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A la lumière de la guerre à Gaza : Des repositionnements géopolitiques se dessinent dans la région

A peine la trêve terminée, les combats ont repris dans l'enclave gazaouie vendredi 1er décembre, avec la bénédiction de Washington. Malgré ses efforts de médiation, le Qatar regrette le retour des hostilités, tandis que Téhéran condamne ouvertement Israël et le soutien américain. Le dossier palestinien complique l’entente entre Téhéran et Ankara, la Turquie persistant à commercer avec l’entité sioniste depuis le 7 octobre dernier.
A la lumière de la guerre à Gaza : Des repositionnements géopolitiques se dessinent dans la région

Dans un communiqué officiel publié sur la plateforme X (ex-Twitter), le Qatar a exprimé ses profonds regrets face à la reprise de la guerre à Gaza après la fin de la trêve entre Israël et le Hamas. « La poursuite des bombardements sur la bande de Gaza dans les premières heures après la fin de la trêve complique les efforts de médiation et exacerbe la catastrophe humanitaire », a souligné dans cette note diplomatique le ministère qatari des Affaires étrangères. Doha appelle de surcroît la communauté internationale à « agir rapidement pour mettre fin aux combats ». Malgré la reprise des combats, le Qatar affirme que « les négociations entre les parties palestinienne et israélienne se poursuivent dans le but de revenir à un état de trêve». « Les négociations sur la trêve à Gaza avec les médiateurs du Qatar et de l’Égypte se poursuivent », a déclaré une source informée des tractations à l’AFP, sous le couvert de l’anonymat, après une nuit d’intenses tractations qui n’ont pas abouti à une reconduction de la pause humanitaire.

De son côté, l’Iran a condamné ouvertement l’État israélien et le soutien américain. « Une fois de plus, les civils, les enfants et les femmes sont les principales victimes des attaques criminelles lancées par l’armée sioniste », a déclaré ce 1er décembre dans un message publié sur X Nasser Kanaani, porte-parole du gouvernement iranien. Il s’est insurgé contre le « massacre continu du peuple palestinien » et s’en est pris « au gouvernement américain et à certains gouvernements qui soutiennent ce régime d’apartheid ». Le chef de la diplomatie iranienne a également réagi à la reprise des combats. « La poursuite de la guerre entre Washington et Tel-Aviv signifie un nouveau génocide à Gaza et en Cisjordanie », a fustigé Hossein Amir Abdollahian vendredi, selon l’agence officielle iranienne Irna.

Moscou, par l’intermédiaire du porte-parole du Kremlin, a regretté la reprise des hostilités entre les deux camps. « Nous aurions bien sûr préféré obtenir la nouvelle de la prolongation de la pause humanitaire », a déclaré ce 1er décembre au cours d’une conférence de presse Dmitri Peskov. « Cela aurait été plus opportun […] étant donné que le processus de libération des otages n’est pas terminé. »

Après une semaine de trêve, les combats ont repris entre l’armée israélienne et le Hamas. Tsahal a accusé ce 1er décembre le Hamas d’avoir « violé la pause opérationnelle en tirant des roquettes vers le territoire israélien », ajoutant que les forces israéliennes avaient donc « repris les combats ». Une ruse qui a été dénoncée le jour même par un journaliste espagnol qui a constaté que les sirènes d’alarme ont retenti du côté israélien  sans le moindre tir de roquettes à partir de Gaza.

La COP est pleine !

Le conflit israélo-palestinien s’est invité à la COP 28 à Dubaï. Le président iranien Ebrahim Raïssi a refusé de s’y rendre en raison de la présence d’Isaac Herzog, chef d’État israélien. En effet, selon l’agence officielle iranienne Irna, E. Raïssi a décliné le 30 novembre l’offre émiratie « en raison de l’invitation des responsables du régime sioniste à assister à la réunion des Nations unies sur les changements climatiques ».

L’Iran a tout de même dépêché son ministre de l’Énergie Ali Akbar Mehrabian à Dubaï le 30 novembre. Ce dernier a néanmoins quitté la conférence « pour protester contre la présence des responsables du régime criminel sioniste à la conférence internationale », rapporte Irna. Et d’ajouter que la présence d’Israël à la COP28 serait « contraire aux objectifs et aux lignes directrices de la conférence ». En marge de l’évènement, le président israélien Isaac Herzog s’est entretenu avec son homologue émirati Mohammed ben Zayed Al Nahyan. L’émir du Qatar qui a fait aussi le déplacement a salué le chef de l’État israélien qui a évoqué la « libération et le retour des otages ». Dans un message sur X (ex-Twitter), il a également précisé avoir « l’intention d’exiger fermement la libération immédiate et inconditionnelle de tous les otages détenus par le Hamas à Gaza ». Parmi la délégation israélienne, pas moins de 1 000 personnes ont été invitées à Dubaï, dont Benjamin Netanyahou.

Les Émirats arabes unis entretiennent des relations diplomatiques avec l’État israélien depuis les accords d’Abraham en septembre 2020. Dubaï a d’ailleurs été le seul pays arabe à avoir ouvertement condamné l’attaque perpétrée par le Hamas le 7 octobre dernier. De surcroît, lors de la réunion arabo-musulmane à Riyad le 11 novembre dernier, les Émirats ont bloqué toute sanction à l’égard d’Israël, rapporte l’Express. Le pays du golfe considère les Frères musulmans comme une organisation terroriste. Le Hamas est proche idéologiquement de cette mouvance. De plus, les Émirats arabes unis prépareraient l’après-guerre dans l’enclave gazaouie. En effet, ils abritent depuis 2007 Mohammed Dahlan, ex-chef de la sécurité de l’Autorité palestinienne à Gaza, chassé avec ses « brigades ». Son nom est de plus en plus évoqué pour prendre la gouvernance de la province palestinienne si le Hamas venait à être défait.

Fritures entre Téhéran et Ankara

La guerre israélienne contre Gaza semble avoir impacté les relations entre l’Iran et la Turquie. Selon le journal libanais al-Akhbar, le président iranien a décidé de reporter sa visite officielle à Ankara prévue mardi 28 novembre.

Officiellement, Hossein Amir Abdollahian, ministre iranien des Affaires étrangères, a imputé ce report à la participation des ministres des AE des deux pays a la réunion du Conseil de sécurité de l’ONU sur Gaza, selon l’agence iranienne Fars news. Mais des sources proches du gouvernement iranien ont informé al-Akhbar que ce report est intervenu après la décision du gouvernement turc d’annuler l’autorisation accordée à un grand rassemblement de soutien à Gaza organisée dans la capitale turque par des groupes et des organisations non gouvernementales turques lorsqu’il a appris que le président iranien y a été convié.

En outre, Téhéran semble lésée par la position que la Turquie a prise sur l’offensive israélienne contre la bande de Gaza, du fait qu’elle s’est contentée de condamnation verbale, sans prendre de mesures opérationnelles, suspendant entre autres ses relations politiques et économiques avec Israël. Des informations évoquent, en effet, une noria de navires turcs qui alimentent Israël. Des dizaines et des dizaines de navires ont pris la mer pour alimenter l’entité sioniste. La Turquie continue d’exporter du gaz à l’entité sioniste et permet à ses ports de faire transiter les marchandises à sa destination.

Des sources ont révélé au quotidien libanais que le discours du guide suprême l’ayatollah Ali Khamenei était adressé à la Turquie en premier lorsqu’il a déclaré que les Etats islamiques devraient limiter leurs exportations en produits énergétiques et en marchandises à l’entité sioniste.

  1. Raïssi avait demandé à Recep Tayyip Erdogan, durant le sommet de l’Organisation de coopération économique à Tachkent le 9 novembre dernier, de rompre ses relations économiques et commerciales avec Israël, mais le président turc a refusé.

Autre signe de la crispation des relations entre ces deux poids lourds du monde islamique : la première dame de Turquie a organisé depuis deux semaines une rencontre de soutien à Gaza des premières dames d’un certain nombre d’Etats islamiques dont le Qatar, la Malaisie et l’Ouzbékistan, sans y avoir convié l’épouse du président iranien.

Appui US affiché !

John Kirby, porte-parole du Conseil de sécurité nationale US, a reconnu que « les États-Unis soutiennent la décision d’Israël de renouveler son agression contre la bande de Gaza, après la fin de la trêve ». Il a affirmé que le peuple palestinien « a besoin d’un parti pour le représenter et d’un gouvernement pour gérer ses affaires, loin du Hamas », ajoutant que « Gaza doit rester un territoire palestinien et que sa superficie ne peut être réduite ». La logique du « regime change » résiste donc à l’usure, côté américain.

Concernant les négociations sur la trêve et l’échange des prisonniers, J. Kirby a annoncé que « la vice-présidente américaine Kamala Harris s’était rendue à Dubaï afin de faciliter le processus de négociation à cet égard », indiquant que « la partie palestinienne devait soumettre des listes de prisonniers israéliens afin de les libérer ».

Auparavant, Anthony Blinken, secrétaire d’État américain était arrivé à Dubaï pour participer à la conférence sur le climat, où il a rencontré des responsables de pays arabes et discuté avec eux de l’avenir de la bande de Gaza, selon Reuters.

Avant de monter à bord de l’avion à la fin de son troisième voyage au Moyen-Orient, depuis le 7 octobre dernier, A. Blinken a déclaré que « les pourparlers d’aujourd’hui vendredi se sont concentrés sur la situation actuelle à Gaza et sur la manière de parvenir à une paix durable et sûre ».

Une source de Dubaï a expliqué que « Blinken avait rencontré les ministres des Affaires étrangères de l’Égypte, du Qatar, des Émirats arabes unis, de Jordanie et de Bahreïn, ainsi que des représentants de l’Autorité palestinienne », en marge de la conférence climatique.

« Le soutien américain n’est pas seulement une position politique », selon un rapport du journal américain The Wall Street Journal, révélant l’étendue du soutien militaire US à l’occupation dans cette agression. Le rapport explique que « Washington a fourni à Israël au moins 100 missiles avancés BLU-109, pesant chacun environ 900 kilogrammes, parmi des dizaines de milliers d’autres armes et obus d’artillerie », selon le média qui cite des responsables US.

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