Yoav Gallant, ministre israélien de la Défense, a tenu une première série de réunions après son arrivée à Washington pour une visite aux États-Unis qui devrait se concentrer sur la guerre entre Israël et le Hamas à Gaza et les combats transfrontaliers intensifs avec le Hezbollah libanais. Y. Gallant rencontre d’abord les dirigeants de l’AIPAC, auxquels il a déclaré que les États-Unis « sont l’allié le plus important d’Israël – et plus central que jamais », avant de rencontrer Lindsey Graham, sénateur républicain de Caroline du Sud.
Avant d’embarquer à bord de son avion en direction de Washington, le ministre a souligné dimanche l’importance de la relation unissant Israël aux États-Unis et il a indiqué qu’il allait avoir, à Washington, des entretiens qui seront déterminants dans la poursuite de la guerre. « Les rencontres organisées avec des responsables de premier plan du gouvernement seront critiques pour l’avenir de la guerre », a-t-il ajouté. « Au cours de ces échanges, je prévois d’aborder l’évolution de la situation sur les fronts nord et sud, à Gaza et au Liban », a-t-il précisé. « Nous sommes prêts à entreprendre toute action qui pourrait être nécessaire à Gaza, au Liban et ailleurs », devait-il préciser en rappelant que « la transition à la ‘phase 3’ à Gaza est de la plus haute importance. Je vais discuter de cette transition avec les responsables américains, voir comment elle pourrait permettre à d’autres choses de se produire et je sais que nous réussirons à mettre en place une coopération étroite avec les États-Unis à ce sujet aussi », a-t-il poursuivi.
Selon les médias israéliens, Y. Gallant devrait rencontrer Antony Blinken, secrétaire d’État américain Lloyd Austin, secrétaire à la Défense, William Burns, directeur de la CIA, et Amos Hochstein, envoyé spécial. Le principal objectif de ce déplacement est d’obtenir le dégel d’une livraison de bombes lourdes que les États-Unis devaient faire parvenir à Israël, une livraison qui a été bloquée.
Ce voyage survient également à un moment marqué par une prise de bec ouverte entre l’administration US et le gouvernement israélien qui, mardi, a diffusé une vidéo où B. netanyahu s’en prenait à Washington pour son blocage « inconvenable » de livraisons d’armes – au-delà, avait-il dit, de la cargaison de bombes lourdes dont le départ a été suspendu. La Maison Blanche depuis a insisté de manière répétée sur le fait qu’elle n’avait « aucune idée » de ce à quoi B. Netanyahu faisait référence, même si le Premier ministre a ultérieurement relancé les mêmes accusations.
Certains analystes ont laissé entendre que cette vidéo pouvait avoir eu pour objectif de garantir que B. Netanyahu pourrait s’attribuer le mérite du transfert d’armements supplémentaires par les États-Unis, si de tels transferts devaient être décidés dans le cadre de la visite effectuée par Y. Gallant.
Le Premier ministre israélien a aussi affirmé dimanche que les combats « intenses » contre le Hamas palestinien à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza où l’armée israélienne mène une offensive terrestre, sont « sur le point de se terminer ». « La phase intense des combats contre le Hamas est sur le point de se terminer. Elle est sur le point de se terminer. Cela ne signifie pas que la guerre est sur le point de se terminer mais la guerre dans sa phase intense est sur le point de se terminer à Rafah », a-t-il annoncé à la chaîne israélienne Channel 14. Après l’opération à Rafah, le Premier ministre a déclaré qu’Israël continuerait à « tondre la pelouse », terme qui, selon le New York Times, est « utilisé depuis longtemps dans les cercles de sécurité israéliens pour désigner le recours à la force visant à empêcher la réémergence d’organisations militantes » “Après la fin de la phase intense, nous serons en mesure de redéployer certaines forces vers le nord”, a précisé B. Nétanyahou, laissant entendre qu’il pourrait envoyer davantage de troupes à la frontière israélo-libanaise pour affronter le Hezbollah, allié du Hamas. Les propos du Premier ministre laissent entendre que « la guerre pourrait bientôt entrer dans une période de changement », analyse le New York Times.
Sur le terrain, pourtant, la résistance palestinienne ne lâche rien à Tel-Aviv. Les Brigades Al-Qods assurent avoir bombardé avec des obus de mortier une position des soldats ennemis sur la ligne de ravitaillement dans l’axe Netzarim, couloir stratégique séparant l’enclave en deux, plusieurs fois pilonné au cours des dernières heures. Ils ont aussi ciblé, avec un barrage d’obus de mortier, une position de soldats et de véhicules de l’occupation au sud du quartier de Tal Al-Sultan, à l’ouest de la ville de Rafah. Les Brigades Al Qassam, bras armé du Hamas, ne chôment pas, non plus. Comme les autres composantes de la résistance palestinienne qui s’activent à faire de l’équipée sioniste dans la bande de Gaza un cauchemar. L’armée sioniste a reconnu la mort de l’un de ses soldats du 9212e bataillon de la 205e brigade blindée de réserve « Iron Fist » de Susya. Sa mort porte à 315 le nombre de militaires tués dans les opérations à la frontière de Gaza. Bilan largement minoré au regard des vidéos documentant les opérations de la résistance palestinienne.
Dans l’enclave palestinienne soumise à un embargo des plus sévères, engendrant famine, soif et dégradation de la situation sanitaire, l’UNRWA a lancé un nouvel SOS en rappelant que Tel-Aviv cherche à mettre fin aux opérations de l’agence, affirmant que « si nous n’agissons pas, d’autres institutions seront la prochaine cible. »
Yuval Diskin, ancien responsable du Shin Bet, a pris la parole lors du mouvement de protestation anti-gouvernemental hebdomadaire à Tel Aviv, qui a réuni des dizaines de milliers de personnes pour protester contre la gestion de la guerre à Gaza et l’incapacité du Premier ministre à négocier la libération des dizaines d’otages toujours retenus dans le territoire palestinien. L’ancien responsable de l’agence de renseignement de 2005 à 2011, a déclaré à la foule que « le pire Premier ministre » de toute l’histoire d’Israël avait passé la dernière décennie à amener le pays dans une situation où aucune sécurité intérieure, régionale ou internationale n’est plus assurée, ajoutant que l’existence d’Israël en tant qu’État était susceptible d’être menacée dans un avenir proche.
Il a réclamé des élections anticipées le plus rapidement possible avec pour objectif de former « un gouvernement d’unité nationale » sans B. Netanyahu et sans les extrémistes et autres fanatiques messianiques. « A ceux qui hésitent encore : il n’y a plus de temps à perdre pour sauver le pays. Soulevez-vous et rejoignez les manifestations en faveur du remplacement du gouvernement », a-t-il dit aux protestataires réunis rue Kaplan, en face du siège du ministère de la Défense, la Kirya. En écho, des milliers de personnes ont alors scandé « Maintenant ! » Appelant les Israéliens à descendre dans les rues et à manifester jusqu’à la dissolution du gouvernement, Y. Diskin a estimé que la priorité pour Israël devait être le retour des otages de Gaza ainsi que la normalisation des liens avec l’Arabie saoudite, d’une manière susceptible d’apporter une solution au conflit israélo-palestinien. David Grossman, l’un des auteurs israéliens les plus connus et lauréat du Prix d’Israel de littérature 2018, a lui appelé les Israéliens à « se battre dans les rues et sur les routes ».
David Hirst, journaliste britannique, a mis en garde Israël contre le fait de devenir un État d’apartheid qui adopte l’idéologie fasciste et converge avec la droite fasciste européenne afin de trouver une solution finale à son conflit avec les Palestiniens. « Si Israël le fait, a-t-il dit, il fera face à un moment existentiel plus tôt que beaucoup ne le pensent. », a-t-il averti dans un article sur le site Middle East Eye. Il a évoqué le phénomène « de rapprochement entre Israël et l’extrême droite européenne malgré l’hostilité excessive entre les deux parties pendant la Seconde Guerre mondiale et jusqu’à récemment ».
Revenant sur les détails de ce rapprochement, comme les récentes déclarations du Premier ministre israélien à Paris, dans lesquelles il décrivait la guerre à Gaza, en s’adressant aux Européens : « Notre victoire est votre victoire ! C’est la victoire de la civilisation judéo-chrétienne sur la barbarie. C’est la victoire de la France ! Si nous gagnons ici, vous gagnez là-bas. », il a évoqué de ce qu’il a appelé la jubilation des Israéliens en raison du succès de l’extrême droite aux récentes élections législatives européennes. Ils l’ont considéré comme une réponse à la reconnaissance de l’État palestinien par l’Espagne, l’Irlande, la Norvège et la Slovénie.
Le journaliste britannique a souligné qu’Adolf Hitler est devenu un exemple pour « Israël ces jours-ci ». Citant Moshe Feiglin, ancien membre de la Knesset du Likoud, il rapporte qu’il a déclaré la semaine dernière à la télévision : « Comme Hitler l’a dit, je ne peux vivre si un Juif reste en vie ; nous ne pouvons vivre ici si un islamiste nazi reste à Gaza ».
« C’est du fascisme, clair et simple. Il est de plus en plus devenu une monnaie courante dans les principaux médias israéliens. Tous les vieux tabous ont disparu, c’est pourquoi les fascistes européens sont si facilement acceptés comme les âmes sœurs des fascistes israéliens », a-t-il déploré.
Dans son article, D. Hirst a évoqué le renforcement des relations entre l’entité sioniste et la Serbie, la hausse des exportations d’armes de cette dernière vers Israël lors de son agression contre Gaza et l’expression de gratitude du Premier ministre israélien au Président serbe.