Les espoirs fondés aux premières heures après le séisme sur les promesses des mesures d’urgence promises par les autorités dans le cadre d’une « réponse forte, cohérente et rapide » se sont évaporés. Un an après, le rapport d’Amnesty Maroc révèle que « les résultats restent bien en deçà des attentes ». Le retard dans l’opérationnalisation de l’Agence de Développement du Haut Atlas (ADHA), supervisant la reconstruction, est l’une des premières critiques. Bien que la création de cette agence ait été annoncée dès octobre 2023, celle-ci peine encore à devenir fonctionnelle. La nomination de son directeur général en octobre 2024 est un signe inquiétant de l’hésitation du gouvernement, marqué par des tensions internes concernant la coordination du programme.
L’écho de la lenteur de l’exécution se matérialise aussi dans le processus de relogement des sinistrés. L’Observatoire rapporte que « les étapes de la reconstruction sont entachées de confusions ». Les premières tranches de financements sont à peine déboursées, et les bénéficiaires se retrouvent confrontés à des difficultés pratiques. La hausse des prix des matériaux de construction et les contraintes techniques liées aux normes imposées rendent difficiles la réalisation des projets des objectifs royaux d’harmonisation avec le patrimoine architectural local. Sur le terrain, les conditions de vie des sinistrés se détériorent alors que l’hiver approche. Le manque de logements temporaires suffisants a exacerbé les frustrations, alimentant un mouvement de protestation parmi les populations affectées. Ces protestations, bien que sporadiques, témoignent du désespoir croissant des 2,8 millions de personnes vivant dans ces zones dévastées.
Les problèmes de transparence sont également pointés du doigt. Malgré les engagements sur la publication des données relatives à la gestion du programme, l’accès à l’information reste limité. Les annonces occasionnelles du gouvernement se font au compte-goutte, à l’instar des réalisations. La communication sur les chantiers de réhabilitation des infrastructures, comme les routes et les établissements publics, demeure floue dénonce l’Observatoire qui peine à disposer d’informations pertinentes.
Dans le domaine social et éducatif, la situation est tout aussi préoccupante. Si le ministère de l’Éducation avait annoncé un plan de reconstruction ambitieux, la réalité sur le terrain est tout autre : le transfert des élèves vers des établissements à Marrakech a été bien en deçà des objectifs, avec seulement 3 000 lycéens transférés contre les 8 000 prévus. L’année scolaire 2023-2024 a été largement marquée par l’absence de scolarité dans les zones sinistrées, et les craintes persistent pour la rentrée 2024-2025.
Quant à la santé, les infrastructures restent inopérantes depuis le séisme. Les engagements du gouvernement pour construire des centres de santé de proximité sont toujours en attente, laissant les populations dans l’incertitude. De plus, la prise en charge des personnes vulnérables (femmes, enfants, handicapés) reste insuffisante, malgré l’implication de la société civile. Le secteur environnemental et l’approche genre, pourtant essentiels dans le cadre d’une reconstruction durable, semblent avoir été largement ignorés, ce qui interroge sur la vision à long terme du programme. En dépit des ressources financières importantes, avec un budget de 120 milliards de dirhams alloué pour les cinq prochaines années, les défis à relever sont énormes.
Le rapport de Transparency Maroc révèle l’échec de la gouvernance du programme de reconstruction et appelle à une révision urgente des méthodes de gestion et à un renforcement de la transparence.