En l’espace de trois jours, entre le 20 et le 23 mai, le ministère russe de la Défense a annoncé la destruction de 1177 drones ukrainiens, dont 788 hors de la zone de l’opération militaire spéciale.
Selon le rapport hebdomadaire de l’armée, les systèmes de défense aérienne russes ont également intercepté 30 bombes aériennes guidées de fabrication américaine JDAM, 12 roquettes de systèmes de lance-roquettes multiples HIMARS également de fabrication américaine, ainsi que 1548 drones.
La nuit du 22 au 23 mai a été particulièrement singulière : 112 drones auraient été neutralisés, dont 24 au-dessus de la région de Moscou. La chute d’un appareil dans une zone industrielle de la ville d’Ielets, située à 350 kilomètres au sud de Moscou, dans la région de Lipetsk, a blessé neuf personnes et endommagé une trentaine d’appartements. Face à cette multiplication des attaques, les autorités russes ont été contraintes de suspendre temporairement les vols dans plusieurs aéroports.
D’après les chiffres publiés par les médias russes, entre le 21 et le 23 mai, les aéroports moscovites ont suspendu ou modifié leurs services à 29 reprises. En parallèle, six régions russes, Ivanovo, Vladimir, Orel, Toula, Lipetsk et Voronej, ont instauré des restrictions sur l’usage du réseau mobile, invoquant la nécessité de mesures de sécurité accrues.
Le Kremlin a fermement réagi à cette série d’attaques, les interprétant comme la preuve d’une absence de volonté de dialogue de la part de Kiev. Le 22 mai, lors d’une réunion en visioconférence avec les membres du gouvernement, le président russe a déclaré que les forces armées russes s’employaient actuellement à créer une zone tampon de sécurité le long de la frontière avec l’Ukraine. Cette mesure aurait pour objectif de réduire les risques d’attaques et de protéger les territoires exposés. Vladimir Poutine a également affirmé que les cibles choisies par l’adversaire n’avaient généralement aucune valeur militaire. Les frappes viseraient des infrastructures civiles, des habitations et des personnes. Les événements récents, selon lui, viendraient confirmer cette tendance : les attaques par drones et les actions menées par des groupes de sabotage et de reconnaissance auraient ciblé des véhicules civils, y compris des ambulances et du matériel agricole.
Dans le même temps, le chef du Kremlin a chargé le ministère du Développement économique, en coopération avec l’administration présidentielle, de préparer dans les plus brefs délais un programme de reconstruction pour les zones frontalières touchées. Ce plan concernerait en particulier les régions de Koursk, de Belgorod et de Briansk, affectées par les frappes et les incursions ukrainiennes.
Lors d’une conférence intitulée « Terres historiques de la Russie du Sud. Identité nationale et autodétermination des peuples », le chef de la diplomatie russe avait dénoncé ce qu’il considère comme une inflexion majeure et inquiétante dans l’orientation stratégique de l’Europe. Selon lui, les dirigeants occidentaux auraient érigé la remilitarisation du continent européen en « tâche magistrale » pour la seconde moitié de la décennie en cours. « Le nazisme authentique est en train de renaître et les exemples sont nombreux, y compris l’intervention du nouveau chancelier allemand, Friedrich Merz, où il a dit qu’il était temps pour l’Allemagne de reprendre la tête de l’Europe. Il faut être vraiment cynique pour prononcer de telles paroles. La militarisation de l’Europe a été proclamée comme l’une des principales tâches de la seconde moitié de la décennie. C’est une tendance très dangereuse », a-t-il indiqué. Parallèlement, S. Lavrov a exprimé une vive préoccupation face à l’implication croissante de l’OTAN dans la région indopacifique. L’expansion géographique des infrastructures de l’OTAN vers l’est de l’Eurasie est interprétée comme un signal clair d’élargissement de ses ambitions, désormais étendues bien au-delà de sa zone euro-atlantique initiale. Ces mouvements s’inscriraient dans une stratégie plus large visant à reconfigurer l’ordre régional à l’avantage des puissances occidentales, au prix d’un affaiblissement des équilibres établis.
D’après le ministre russe, l’Alliance atlantique y multiplierait les initiatives, notamment en tentant d’attirer certains États membres de l’ASEAN (l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est) dans des formats de coopération restreints, contournant ainsi les mécanismes multilatéraux en vigueur. Cette approche contribuerait, selon lui, à fragiliser l’unité de l’association régionale, traditionnellement fondée sur le consensus et la neutralité.
A signaler que la Russie et l’Ukraine ont entamé vendredi la première étape d’un échange record de prisonniers, impliquant à ce stade 270 militaires et 120 civils. Côté russe, Moscou a annoncé avoir récupéré 270 de ses soldats et 120 civils, dont « des habitants de la région de Koursk capturés par les forces armées ukrainiennes » lors de leur offensive à l’été 2024. Kiev a pour sa part récupéré le même nombre de militaires et de civils, dont des soldats de la marine, des forces aéroportées, des forces de défense territoriale, ainsi que de la garde nationale et des gardes-frontières, selon les autorités.
Cet échange, qui doit au total impliquer « 1 000 pour 1 000 » prisonniers de guerre, avait été convenu lors des dernières négociations directes entre Russes et Ukrainien à Istanbul mi-mai.