« Je suis très heureux de vous voir. Nous aurons des conversations officielles demain. Aujourd’hui, nous pouvons parler calmement dans cet environnement convivial, sans doute des mêmes problèmes, mais de manière informelle », a déclaré le président russe à son invité. V. Poutine a félicité N. Modi pour sa réélection à la tête du gouvernement indien, qui est selon lui le résultat de « nombreuses années de travail ».
Les deux dirigeants ont ensuite assisté à une représentation équestre. Le chef de l’État est arrivé plus tôt dans la journée dans la capitale russe, son premier voyage en Russie depuis cinq ans. Il s’est déclaré avant son départ « impatient » de voir son « ami » V. Poutine. Il a par ailleurs salué le « partenariat stratégique spécial et privilégié entre l’Inde et la Russie », qui a progressé au cours des dix dernières années, notamment dans les domaines de l’énergie, de la sécurité, du commerce, de l’investissement, de la santé, de l’éducation, de la culture, du tourisme et des « échanges entre les peuples ».
Les négociations officielles ont eu lieu mardi 9 juillet. Une conversation privée et un dialogue sous la forme d’un petit-déjeuner officiel étaient prévus, mais aucune communication conjointe devant la presse. Dmitri Peskov, porte-parole du Kremlin, a indiqué qu’un échange de vues élargi est attendu lors de ces réunions, ce qui « compensera largement le manque de déclarations aux médias ». N. Modi rencontrera également la communauté indienne en Russie, avant de déposer une gerbe sur la Tombe du Soldat inconnu et de visiter le pavillon de Rosatom lors d’une exposition à Moscou.
La visite de N. Modi à Moscou et les marques d’amitié ont suscité la colère de Volodymyr Zelensky. « Nos pays entretiennent une amitié de très longue date, de bonnes relations qui se sont développées au fil des décennies. Aujourd’hui, nos relations ont le caractère d’un partenariat stratégique privilégié », a déclaré d’emblée Vladimir Poutine, accueillant le Premier ministre indien au Kremlin. « Nous célébrons 77 ans d’établissement de relations diplomatiques », a précisé le dirigeant russe, avant de se féliciter du développement grandissant des relations commerciales avec New Delhi. « L’année dernière, le chiffre d’affaires commercial entre les deux pays a augmenté de 66%, et au premier trimestre 2024, il a encore augmenté de 20% », a noté le leader russe. Lequel a notamment remercié son hôte pour l’« attention » que celui-ci accordait à la « résolution pacifique de la crise ukrainienne ».
N. Modi, à son tour, s’est dit convaincu que Moscou et New Delhi continueraient à travailler ensemble et à « renforcer tous les aspects de la coopération », soulignant des rapports « très étroits » avec la Russie, et rappelant qu’il avait rencontré son V. Poutine à 17 reprises. « Nous continuerons de renforcer l’ensemble des aspects de notre coopération », a-t-il annoncé. « Grâce à l’amitié indo-russe, nous avons surmonté un certain nombre de crises, d’approvisionnement de combustibles et alimentaires », a fait valoir le responsable indou. « Nous avons pu échanger des produits comme des engrais et nous avons pu échanger des intérêts, notre coopération ira dans ce sens. Nous avons pu éviter les difficultés de la crise énergétique mondiale grâce à la collaboration entre la Russie et l’Inde. Nous avons pu aboutir à une stabilité des marchés », a-t-il encore ajouté. N. Modi a également confirmé avoir déjà discuté des « questions ukrainiennes » avec V. Poutine la veille au soir. Il a souligné que leur rencontre était « scrutée » par le monde entier. « Lorsque éclate un conflit, nous devons avoir la possibilité de discuter ensemble », a ensuite déclaré le chef de l’exécutif indien. « En tant que votre ami, je dirais que nous pensons que les conflits ne se résolvent pas par des moyens militaires, nous mettons l’accent sur le dialogue et les négociations », a-t-il ajouté. « Je suis très heureux de nos discussions informelles, je pense que c’était un moment intéressant. J’ai des raisons d’être optimiste et je veux vous remercier », lui a répondu V. Poutine.
De son côté, V. Zelensky a dénoncé sur les réseaux sociaux la visite du dirigeant indien. « C’est une énorme déception et un coup dévastateur pour les efforts de paix que de voir le dirigeant de la plus grande démocratie du monde étreindre le criminel le plus sanguinaire du monde à Moscou », a-t-il écrit.
L’Inde et la Russie ont maintenu des liens solides en dépit des pressions occidentales. New Delhi a critiqué le sommet sur l’Ukraine en Suisse, refusant de soutenir le texte final adopté le 16 juin. L’Inde a souligné que seules des solutions acceptables pour « les deux parties » pouvaient parvenir à une paix durable en Ukraine. Des propos qui n’ont guère plu à Kiev. Dmytro Kuleba, ministre ukrainien des Affaires étrangères, a concédé en Suisse que plusieurs pays avaient exprimé une vision différente du conflit. « Hier, des voix se sont élevées parmi les pays du Sud pour parler de compromis difficiles qui doivent être trouvés. Ce n’est pas le langage que nous entendons de la part des partenaires occidentaux », a-t-il rapporté.