Contrairement aux menaces proférées par des officiels israéliens d’étendre la guerre, les médias israéliens semblent sceptiques sur la capacité d’Israël à lancer une offensive de grande envergure contre le Liban et surtout à l’emporter.
Selon le Haaretz, le cabinet de guerre appréhende une guerre globale avec le Hezbollah, estimant que l’armée ne lui est pas prête. Rafit Hicht y écrit qu’« il y a un grand fossé » entre les déclarations fermes de responsables israéliens qui promettent de lancer une offensive de grande envergure en raison de l’escalade au nord durant ces dernières semaines et celles qui sont exprimées dans des discussions en privé.
Contrairement aux déclarations d’Itamar ben Gvir, ministre ultra de la Sécurité nationale et de Bezalel Smotrich, ministre des Finances qualifiées de « vides », les décideurs craignent de voir Israël se glisser vers une guerre globale avec le Hezbollah, selon le journal. Ce dernier a mis en garde contre « des destructions sans précédent sur le front interne israélien qui selon certaines ministres pourraient engendrer des semaines de chaos global de plusieurs semaines ».
Le Haaretz estime que ce scénario pourrait donner au terme de la guerre « un nouveau sens qui puisse être plus menaçant et plus terrifiant que le sens d’épuisement et douloureux qu’Israël connait dans la bande de Gaza ». « L’ambition qui préoccupe le cabinet de guerre est clairement celui de garder le combat en dessous du seuil qui pourrait pousser le Hezbollah à lancer une grande offensive », estime le quotidien.
Le Haaretz assure dans un autre article que « l’armée israélienne n’est pas prête pour une autre vraie guerre », estimant que « ses ressources sont surexploitées à l’extrême après 8 mois de combats à Gaza et d’état d’alerte maximum au nord ». Il estime aussi que l’armée n’a pas été conçue pour combattre sur deux fronts, sans compter l’intervention du Yémen, de la résistance en Irak voire depuis la Jordanie, et de la Cisjordanie. Avant de conclure que « la guerre pourrait causer des destructions énormes en Galilée, des attaques sur Haïfa et le centre d’Israël tandis que Netanyahu serait caché dans son abri ».
Amos Harel, chroniqueur militaire de ce journal, estime que l’expansion de la guerre avec le Liban poussera « Israël au bord du gouffre surtout avec l’absence de légitimité internationale avec une armée épuisée ».
Le Centre de recherches Alma a lui aussi mis en garde contre le scénario d’une grande guerre avec le Liban. Évoquant dans ce cas que le front israélien absorbera une quantité de feux sans précédent, même en 2006. Tal Perry, directeur de ce Centre, a écrit qu’il s’attend à ce que « les missiles et les obus du Hezbollah visent tout Israël avec une capacité de précisions ». En cas de guerre « le Hezbollah va envoyer plusieurs milliers de drones et de missiles sur Israël chaque jour », prévient-il« et va tenter d’envahir la Galilée » estimant que « l’unité Redwan est capable de le faire ». T. Perry considère que le Hezbollah voulait cette guerre avec Israël mais le Hamas l’a précédé par son opération le 7 octobre.
Du côté de la télévision israélienne Channel 13, on pense « qu’une opération terrestre n’éradiquera pas la menace du Hezbollah ». Et d’indiquer que l’image selon laquelle l’armée est sur le chemin de lancer une bataille au nord n’est pas précise estimant « qu’il n’est pas encore clair ce qu’Israël est capable de faire et ce qu’il veut réaliser ».
Giora Eiland, président du Conseil de Sécurité Nationale, semble, lui, plutôt pessimiste assurant qu’Israël n’a pas la capacité de triompher contre le Hezbollah. « Israël n’a pas la capacité de détruire des centaines de milliers de roquettes et de projectiles », a-t-il insisté indiquant en revanche que la capacité du Hezbollah à poursuivre la guerre est « très élevée dans ce domaine ». Et de conclure que « la défaite sera terrible pour Israël de sorte que tout le front interne israélien dont l’infrastructure nationale seraient totalement paralysés ».
Yitzhak Brik, général de division israélien à la retraite a tiré la sonnette d’alarme sur les risques d’implosion et de l’armée et de la société israélienne. Qualifiant Tashal de « petite armée », il a ajouté qu’Israël a tout pour perdre faute de disposer d’un trop plein de force.
Ces prévisions qui ne prévoient pas de victoire israélienne en cas de guerre avec le Liban interviennent après des déclarations selon lesquelles le cabinet israélien restreint envisage de transformer le Liban en « un principal champ de guerre », en y menant une offensive terrestre de sorte que la bande de Gaza devienne « un champ de guerre secondaire ».