L’Ukraine a reconnu lundi une situation « compliquée » au nord de Bakhmout, épicentre des combats dans l’est du pays, où l’armée russe a revendiqué la récupération d’un nouveau village dans sa tentative d’encercler cette ville forteresse du Donbass.
Alors que le président ukrainien réclame aux Européens davantage d’armes, notamment de longue portée et des avions de combat, l’Otan a averti que Kiev engrange plus de munitions qu’elle n’en produit.
Selon l’AFP, ces dernières semaines, les troupes russes ont progressé notamment au nord de Bakhmout, cité de quelque 70.000 habitants avant la guerre, en grande partie détruite par plus de six mois de combats. Depuis des semaines, rapporte l’agence russe Sputnik, l’armée russe est en train d’encercler cette ville stratégique dans le Donetsk, importante pour les Russes en raison de sa situation géographique et de sa position dans le système de défense ukrainien. L’armée russe assure avoir pu gagner deux kilomètres dans les profondeurs des défenses ukrainiennes soumises à rude épreuve.
La présidence ukrainienne a admis lundi une situation « compliquée » dans le village de Paraskoviïvka, au sud de Soledar, à une dizaine de kilomètres du centre de Bakhmout, qui « fait face à des bombardements et à des assauts intenses » russes, selon l’AFP. Soledar et ses mines de sel ont été récupérées le mois dernier par les Russes et leurs alliés.
L’armée russe a, ce lundi, revendiqué la capture du village de Krasna Gora, à proximité immédiate de Paraskoviïvka. Selon elle, « des unités d’assaut de volontaires, avec l’appui feu des forces d’artillerie du groupe Sud ont libéré le village ». Denis Pouchiline, responsable pro russe dans l’est de l’Ukraine, avait affirmé vendredi que les troupes de Moscou avaient désormais sous leur contrôle trois des quatre voies d’approvisionnement ukrainiennes vers Bakhmout. L’état-major ukrainien a indiqué dans son propre rapport quotidien que les troupes russes avaient bombardé seize localités près de Bakhmout au cours de la journée écoulée avec des chars, des mortiers et de l’artillerie.
Dimanche, Serguiï Tcherevaty, porte-parole du commandement « Est » de l’armée ukrainienne, avait déclaré que « le secteur de Bakhmout est toujours la zone principale des attaques de l’ennemi » avec 167 bombardements et 41 affrontements armés.
L’intendance ne suit pas
Face à la pression militaire russe, Jens Stoltenberg, SG de l’OTAN, a assuré que l’armée ukrainienne consomme plus de munitions que ce que l’industrie européenne et nord-américaine est capable de produire.
Les pays alliés qui fournissent des armes à l’Ukraine ont encore du stock, mais il faut maintenant que les industriels comprennent qu’ils auront des commandes et des contrats conséquents et à long terme et qu’ils peuvent d’ores et déjà augmenter les cadences et les investissements, affirme-t-on. Aux yeux de J. Stoltenberg, la question est d’autant plus pressante que l’offensive de printemps de l’armée russe a en réalité déjà commencé. « Ce que la Russie fait maintenant est d’envoyer des milliers et des milliers de soldats supplémentaires, en acceptant un taux de pertes très élevé pour faire pression sur les Ukrainiens. Et ce dont les Russes manquent en qualité, ils essaient de le compenser en quantité. Donc pour moi, cela ne fait que souligner l’importance du timing, a insisté le « patron » de l’OTAN. Dès lors, « il est urgent de doter l’Ukraine de plus d’armes. Plus vite, nous pouvons livrer des armes, des munitions, des pièces de rechange, du carburant sur le front ukrainien, plus nous sauvons de vies et mieux nous soutenons les efforts pour trouver une solution pacifique et négociée à ce conflit », rappelle-t-il.
Les pays de l’Otan vont aussi former de plus en plus de soldats ukrainiens pour qu’ils perdent l’habitude soviétique de consommer des munitions à outrance. Les chiffres fiables sur la quantité de munitions utilisées sont inaccessibles, mais les niveaux de consommation de part et d’autre sont très élevés dans un conflit étiré, une guerre parfois enlisée dans des tranchées avec des combats incessants sur fond d’artillerie omniprésente. Les Russes tiraient ainsi jusqu’à 50 000 obus par jour en juillet ; les Ukrainiens jusqu’à 6 000, selon une source militaire française. Mais la consommation ukrainienne a fortement augmenté à partir de sa contre-offensive fin août. Et elle aura besoin d’une énorme puissance de feu pour résister à l’offensive russe attendue pour les semaines à venir.