Aziz Akhannouch aura raté le bain de foule qui sied à son rang dimanche dernier. Il aura été bien inspiré par les « Spin Doctors » qui le conseillent pour un oui comme pour un non, de se mêler aux foules qui ont choisi d’investir la capitale, et non plus le dernier Festival de l’Amandier qui eut lieu à Tafraout, région à laquelle appartient sa propre smala, pour exprimer leur colère. Devant le parlement, lieu de fixation de tous les rendez-vous ratés dans le Royaume, les pauvres victimes du séisme d’el Haouz ont convergé pour crier leur désespoir. Un sit-in de plus après les marches improvisées, et éminemment infructueuses, menées à l’échelle régionale par ces hommes et femmes qui ne carburent qu’à l’énergie du désespoir.

Il fut un temps où la faconde officielle conjuguait dans tous les temps la politique de proximité. Du passé, faisons table rase, semble dire la rhétorique de l’actuel Exécutif qui n’a d’œil que pour les grands projets à lancer, comme l’hydrogène vert, où les réformes à poursuivre pour casser le reste de l’outil de l’Etat Providence, du type levée de la subvention sur le gaz butane qui, comble de l’ironie, a coïncidé avec le début du Ramadan. Mois durant lequel des millions de bouches s’évertuent à casser la tire-lire pour assurer une rupture du jeûne potable.

En face, le chef du gouvernement aurait retrouvé les victimes de l’exclusion, de la marginalisation et de l’indifférence ayant marqué de leur empreinte la gestion chaotique post-séisme. Celles que l’élan solidaire de Joud n’aura en rien réussi à couvrir de ses promesses. Ni à Taroudant, ni à Agadir, et encore moins à Marrakech, la voix de ces crève-misère, lâchés par leur Etat, coloré pour la circonstance dans une teinte « socio-libérale » serine-t-on, n’a eu le moindre écho !

Normal qu’ils aient marché sur la capitale, là où le débat sur la décentralisation et la déconcentration n’en finit pas, et qu’ils se lâchent devant le siège de la représentation populaire qui semble les avoir oubliés… Comme tant d’autres millions d’exclus juste bons à mobiliser pour réussir un tant soit peu à bourrer les urnes. Ni A. Akhannouch n’a été au rendez-vous, ni son factotum qui préside la vénérable chambre des représentants n’a entendu les cris de colère de ces victimes du séisme mobilisés pour dénoncer les détournements des fonds d’aide dont bénéficient, comme par miracle, les non-éligibles…

L’Etat, comme ses représentants, sont devenus sourds aux maux de la société. Et aux drames de ces sans-culotte qui, dans leurs guenilles, rappellent le Royaume des inégalités.

L’affaire est grave à l’heure où le froid s’est emparé des régions dévastées par le tremblement de terre avec les dernières chutes de neige… Cela sans parler des ondées qui, on peut l’imaginer aisément, transforment les tentes de fortune en de véritables linceuls sales.

Plusieurs mois nous séparent du drame d’El Haouz du 8 septembre dont les répliques ont été ressenties, dramatiquement, dans d’autres régions. Et pourtant, du processus de reconstruction qui devait mobiliser toutes les énergies du pays ne restent que les promesses non tenues. Rachid Talbi Alami s’est invisibilisé au point de se demander s’il ne nourrit pas la crainte de voir les Marocains le prendre au mot en lui jetant la pierre.

Le patron de l’Exécutif ne peut pas se soustraire à ses obligations vis-à-vis des victimes du séisme. Quand bien même l’affaire s’avérerait lourde, une autre gestion de la catastrophe aurait pu être imaginée pour rassurer les dizaines de milliers de laissés pour compte. En tout cas, il a été averti par la Coalition Civile pour la Montagne qui a attiré son attention sur le drame en cours via une lettre ouverte. En chef d’orchestre, il se doit de mobiliser tous les départements qui peuvent apporter une plus-value pour venir en aide aux sinistrés. L’affaire est grave. Et ce n’est pas l’étude élaborée par le Moroccan Institute for Policy Analysis (MIPA) qui pourrait éluder la lourdeur du dossier et sa gestion chaotique. Les sondeurs dudit institut gagneraient à faire du terrain pour se rendre à l’évidence au lieu de supputer, dans des bureaux climatisés, que 77 % des citoyens marocains sont satisfaits de la gestion par le gouvernement de la crise du séisme.

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