«J’ai pris la décision de mettre en œuvre un ensemble de mesures pour passer au paiement en roubles de notre gaz livré aux pays hostiles, et de renoncer dans tous les règlements aux devises qui ont été compromises», a annoncé le 23 mars le président russe lors d’une réunion gouvernementale, expliquant qu’il s’agissait d’une réaction au gel des actifs de la Russie en Occident.
«Les Etats-Unis et l’UE se sont déclarés en cessation de paiement sur leurs engagements vis-à-vis la Russie. Et désormais, chacun dans le monde sait [que] les engagements en dollars et en euros peuvent ne pas être remplis. […] Livrer nos produits à l’UE et aux Etats-Unis et recevoir des paiements en dollars, en euros et dans certaines autres devises n’a plus de sens pour nous», a ajouté le maitre du Kremlin, soulignant que son pays «continuerait certainement à fournir du gaz naturel, conformément aux volumes et aux prix et selon les principes de tarification indiqués dans les contrats conclus précédemment». «Contrairement à certains de nos collègues, nous tenons à notre réputation de partenaire et de fournisseur fiable», a-t-il poursuivi.
Alexandre Novak, vice-Premier ministre russe a également assuré, le jour-même, que la Russie n’avait jamais utilisé les ressources énergétiques comme arme et, qu’encore aujourd’hui, son pays continuait à fournir du gaz à l’Europe, y compris via l’Ukraine, conformément à toutes ses obligations. «La Russie n’a rien à voir avec cette situation et n’a en aucune manière contribué à la baisse [des volumes] des livraisons des ressources énergétiques», a-t-il précisé.
Moscou au G20
La confrontation russo-occidentale prend de la sorte une nouvelle tournure alors que le chancelier allemand a réagi en jugeant « non conforme au contrat » le recours de la Russie à l’arme monétaire. Plus tard, c’est le Premier ministre britannique qui s’agitait en appelant à s’attaquer aux réserves d’or russes. Ces réactions interviennent à la veille de plusieurs rencontres à Bruxelles, y compris celle de l’OTAN, à laquelle le Président américain devait prendre part. Objectif de ces réunions, l’examen d’un nouveau paquet de sanctions contre Moscou.
A signaler aussi que l’ambassadrice de Russie en Indonésie a confirmé que Jakarta avait invité V. Poutine au prochain sommet du G20 à Bali. Cette annonce survient alors que les Etats-Unis étudient une éventuelle exclusion de la Russie du forum intergouvernemental. Comme le rapporte l’AFP, Lioudmila Vorobieva, ambassadrice de Russie en Indonésie, a indiqué que le président russe pourrait participer au sommet du G20 qui doit se tenir en novembre dans le pays. La diplomate a en tout cas confirmé que Jakarta l’avait invité au sommet des chefs d’Etat et de gouvernement prévu en novembre prochain à Bali.
«[Sa venue] dépendra de beaucoup de choses, notamment de la situation liée au Covid, qui s’améliore à présent. Mais jusqu’à présent l’intention est qu’il vienne», a-t-elle indiqué à des journalistes le 23 mars.
La diplomate a également fustigé les velléités occidentales d’exclure la Russie de plusieurs organisations internationales, une réaction «disproportionnée», selon elle. Moscou salue ainsi «la position ferme» de l’Indonésie quant à sa volonté d’inviter la Russie au prochain G20. «Nous espérons vraiment que le gouvernement indonésien ne va pas céder à cette pression horrible qui est exercée, non pas seulement sur l’Indonésie, mais sur de nombreux pays dans le monde par les Occidentaux», a-t-elle affirmé avant de préciser que «l’expulsion de la Russie de ce type de forum n’aidera pas à résoudre les problèmes économiques. Au contraire, sans la Russie, ce sera difficile».
Cette annonce survient alors que les Etats-Unis ont annoncé qu’ils avaient l’intention de prochainement consulter leurs alliés sur une possible exclusion de la Russie de certaines organisations internationales, dont le G20, qui regroupe les vingt plus grandes économies mondiales.
Le 22 mars, Jake Sullivan, conseiller à la sécurité nationale de Joe Biden, avait évoqué une possible exclusion de la Russie de certaines instances internationales telles que le G20. Il a néanmoins précisé que Washington souhaitait d’abord consulter ses alliés. «Sur la question du G20, je dirais simplement ceci : nous pensons que la Russie ne peut pas faire comme si de rien n’était dans les institutions internationales et dans la communauté internationale», a-t-il affirmé, propos repris par l’AFP.
Le Kremlin dénonce la «pression diplomatique» américaine sur les autres membres du G20 Moscou a rapidement réagi aux propos du responsable US. Dmitri Peskov, porte-parole du Kremlin, a exposé lors d’une lors d’un point presse les manœuvres diplomatiques américaines. «Le fait que, en termes d’opposition globale à notre pays, les Etats-Unis exercent déjà une pression diplomatique […] sur tous les pays, est bien connu de tous», a-t-il déclaré. Il a également souhaité rappeler que le G20 est «un format multipartite» où «différents points de vue» s’expriment.
Malgré les pressions américaines, D. Peskov se dit confiant dans la capacité de certains Etats à faire leur propre choix. «Comme nous le voyons, un certain nombre d’Etats choisissent de s’en tenir à leur point de vue indépendant et souverain», a-t-il expliqué.
Plusieurs responsables indonésiens interrogés par l’AFP ont indiqué que lors du sommet la question de l’intervention militaire russe en Ukraine sera au maximum écartée du programme des discussions. La Russie a déjà été suspendue indéfiniment du G8 après le rattachement par voie référendaire de la Crimée en 2014. Le groupe des plus grands pays industrialisés est revenu ensuite au format du G7.