Benyamin Netanyahu a envoyé une délégation à Doha le 13 mai, après s’être entretenu avec Steve Witkoff, envoyé américain et Mike Huckabee, ambassadeur américain à Tel Aviv. Le correspondant de la chaîne israélienne a noté « qu’Israël a déclaré que la date limite pour que le Hamas accepte le plan de Witkoff était que quand Trump quittera la région, et il est parti ».
Yinon Magal, journaliste israélien proche du Premier ministre israélien a également souligné que « ce qui se passe actuellement à Gaza est un bombardement préliminaire, alors que les négociations de Doha touchent à leur fin. Si aucun accord n’est trouvé, les forces commenceront à pénétrer dans la bande de Gaza ».
De son côté, un correspondant du site israélien Walla a révélé que « l’armée se prépare à la phase suivante, qui vise à restituer les prisonniers et à renverser le régime du Hamas », soulignant que « la pression sur la bande de Gaza va progressivement augmenter ». Il a ajouté que « les attaques menées au cours des dernières 24 heures visent à faciliter l’entrée des forces dans la phase terrestre ».Almog Boker, correspondant de la chaîne 12, a ajouté que « l’armée israélienne a mené des attaques massives sur des centaines de cibles depuis 2 heures du matin », notant que « c’est ce qu’on appelle la préparation à l’entrée des forces dans la zone, donc des travaux sont en cours pour préparer la zone afin que les forces qui entrent ne soient pas blessées ».
Le correspondant d’Al-Manar a rapporté tôt vendredi que « l’armée d’occupation israélienne a avancé dans la zone du cimetière des Sultans au nord-ouest de Beit Lahia, au nord de Gaza », notant que « des centaines d’habitants sont pris au piège en raison des intenses bombardements aériens et d’artillerie israéliens ». Dans ce contexte, la Douzième chaîne a rapporté que « l’armée a largué des tracts dans le nord de la bande de Gaza appelant à une évacuation vers le sud ».
« Que signifie occuper Gaza ? » s’est interrogé rédacteur en chef de Globes, Neama Sekuler, lors d’une interview accordée à Channel 12. « Cela signifie entrer en guerre, mettre fin à la vie de centaines de milliers de réservistes, permettre à des publications de nous parvenir chaque jour et plusieurs fois par semaine, et entrer dans un problème où nous mettons la vie de prisonniers en danger, sans savoir ce qui en résultera », a-t-il spécifié.
Signaux US contradictoires
Le président américain s’est engagé vendredi à « régler » la situation dans la bande de Gaza « affamée », alors que des raids hystériques depuis jeudi y ont fait plus de 250 martyrs. « Nous nous intéressons à Gaza. Et nous allons faire en sorte que cela soit réglé. Beaucoup de gens sont affamés », a déclaré D. Trump.
Le Conseil de l’Europe qui compte 46 pays membres a dénoncé vendredi une « famine délibérée » à Gaza, estimant que la politique israélienne ne fait que « semer les graines du prochain Hamas » dans le territoire dévasté par 19 mois de guerre. « Le moment est venu de tirer des conclusions morales du traitement des Palestiniens, ce qui n’a que trop tardé », a déclaré dans un communiqué Dora Bakoyannis, rapporteuse de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe pour le Moyen-Orient. « Aucune fin (…) ne justifie les moyens. Le massacre d’enfants et de civils sans défense, la famine délibérée et la souffrance comme l’humiliation incessantes des Palestiniens de Gaza doivent cesser », écrit l’élue du Conseil de l’Europe, vigie des droits de l’homme et de la démocratie sur le continent.
Depuis le 2 mars, les forces israéliennes bloquent toute entrée d’aide humanitaire dans Gaza, vitale pour ses 2,4 millions d’habitants, désormais menacés de famine, selon plusieurs ONG.
Pour D. Bakoyannis, « un pays intelligent et courageux doit reconnaître quand ses actes causent plus de mal que de bien », ajoutant que « ce qui se passe à Gaza ne profite à personne . » Et la rapporteuse d’ajouter que « bien au contraire, cela met en danger la vie des derniers otages et sème les graines du prochain Hamas », avant de conclure que « la nation israélienne est suffisamment intelligente et courageuse pour reconnaître cette vérité et mettre un terme à ce chapitre sombre et tragique de l’histoire humaine ».
Dans les déclarations officielles des dirigeants occidentaux, aucune pression ni même une menace de sanction n’est préconisée.
Alors que l’AFP évoque un contexte de pressions internationales pour qu’Israël cesse de bloquer l’entrée de l’aide humanitaire dans le territoire exsangue, B. Netanyahu ne semble pas être dissuadé pour autant. Lundi, il avait averti d’une prochaine entrée « en force » de l’armée à Gaza pour « achever l’opération et vaincre le Hamas ». Ces deux derniers jours, les frappes de l’armée israélienne ont été les plus violentes et les plus meurtrières depuis le début de la guerre.
Force est de constater que les déclarations occidentales stigmatisent la famine, sans les frappes sanguinaires israéliennes perpétrées sur l’enclave et qui ont fait au moins 250 morts en 36 heures. Là non plus, ni les Américains ni les Européens ne préconisent des mesures qui puissent contraindre les dirigeants israéliens.
Selon Times of Israel, citant deux responsables arabes, depuis la reprise, à Doha mercredi, des négociations, l’envoyé spécial des États-Unis pour le Moyen-Orient, a indiqué aux médiateurs que Washington n’avait aucunement l’intention de forcer Israël à mettre fin à la guerre à Gaza. Contrairement à ce qu’espéraient les médiateurs qataris et égyptiens, compte tenu des propos tenus par D. Trump et d’autres conseillers de haut rang au sujet de la fin à la guerre suite à la libération, lundi par le Hamas, du captif américano-israélien Edan Alexander.
En Israël, les appels lancés par le Forum des otages et des familles de disparus, favorable à un accord pour mettre fin à la guerre en échange de la libération des captifs sont restées lettres mortes. Ce matin-même, le Forum a dit son inquiétude face à l’intensification des frappes dans la bande de Gaza et le risque qu’Israël passe à côté des occasions diplomatiques historiques rendues possibles par le déplacement du président américain dans la région en cas de poursuite de la guerre.
Les hôpitaux ont accueilli plus de 250 martyrs durant les 36 dernières heures, a révélé Dr Mounir al-Dabach, directeur général du ministère de la Santé à Gaza, assurant que l’armée d’occupation israélienne utilise des armes prohibées. Les hôpitaux sont débordés et ne peuvent soigner tout le monde, a-t-il indiqué assurant que le bilan des martyrs risque d’être revu à la hausse.
Le correspondant d’al-Manar dans la bande de Gaza a rendu compte de 73 martyrs depuis l’aube de vendredi. Dont plus de 60 à Gaza-ville, Beit Lahia et le camp de Jabalia dans le nord, spécifiquement visés par les raids aériens et bombardement d’artillerie israéliens. Le quotidien israélien Maariv a rendu compte de 100 raids en 24 heures.
L’observatoire Euromed a quant à lui recensé 110 martyrs au nord de la bande de Gaza en moins de 12 heures dans des bombardements qui ont visé 10 maisons à Beit Lahia, faisant remarquer que des victimes sont encore ensevelies sous les décombres. Il constate une escalade gravissime du rythme du génocide israélien dans l’enclave dans « l’une des offensives la plus meurtrière » depuis le début de la guerre en recourant à « la politique de la terre brûlée et à la destruction totale des quartiers et des infrastructures ».
Un médecin à l’Hôpital indonésien de Beit Lahia a déclaré à l’AFP sous le couvert de l’anonymat que son établissement avait reçu 30 corps. Des images de l’AFP montrent des habitants, dont des enfants ayant perdu leur mère, se lamenter sur le corps de leurs proches, et des blessés soignés à même le sol au milieu des cris et pleurs.
Mohammed Saleh, directeur par intérim de l’hôpital Al-Awda de Jabalia, a indiqué de son côté à l’AFP que son hôpital avait reçu cinq corps et soignait « plus de 75 blessés » à la suite de ces frappes. « Ce dont nous sommes témoins aujourd’hui est la préparation du terrain pour exterminer les Palestiniens à Gaza », a affirmé pour sa part le directeur des hôpitaux de terrain dans la bande de Gaza pour la chaine qatarie al-Jazeera. « Gaza est devenu l’enfer sur terre ». Des médias palestiniens rapportent que des bombes fumigènes ont été larguées sur cette ville avant son bombardement frénétique. Dans la journée, un raid a frappé une voiture transportant des déplacés.
Un membre de la Défense civile a assuré que les corps des membres de la famille al-Zinati qui sont enterrés sous les décombres de leur maison, n’ont pu être dégagés à cause des raids israéliens incessants. Parmi les martyrs de vendredi figure le directeur du commissariat de police de Beit Hanoune au nord de l’enclave, le caporal Zaher Ayman Aliane.
Selon un nouveau bilan des victimes palestiniennes du génocide, depuis 7 octobre 2023, fourni par le ministère de la Santé, le chiffre des martyrs est de l’ordre de 53.119 et celui des blessés a atteint le 120.214.
Des sénateurs contre le blocus
A signaler que des membres du Sénat américain du Parti démocrate ont présenté un projet de résolution appelant l’administration du président américain « à utiliser tous les moyens diplomatiques disponibles pour mettre fin de toute urgence au blocus de la bande de Gaza et à travailler à trouver une solution pour mettre fin au conflit ».
Le projet de résolution a été présenté par 30 membres du Conseil, qui ont appelé « à l’entrée urgente de nourriture et d’aide humanitaire dans la bande de Gaza pour répondre aux besoins fondamentaux des civils », soulignant que « la situation humanitaire à Gaza exige une action immédiate de l’administration américaine et de la communauté internationale ». Les membres ont également exprimé « leur profonde préoccupation face à la crise humanitaire actuelle dans la bande de Gaza, notamment la famine imminente qui menace des dizaines de milliers d’enfants ».
La bande de Gaza connaît une guerre d’extermination depuis le 7 octobre 2023, qui a fait plus de 172 000 morts et blessés. Le New York Times a publié récemment un rapport citant des officiers israéliens qui ont admis que « le gouvernement israélien a publiquement ignoré les avertissements d’une grave pénurie alimentaire en bloquant l’aide humanitaire ». Cependant, une analyse interne a conclu « qu’une crise se profilait si l’approvisionnement alimentaire de la bande de Gaza ne reprenait pas ».