La FNSA et la CETIM ont indiqué avoir « déposé une saisine auprès des mécanismes internationaux de protection des droits humains », en raison des « lourdes restrictions sur le droit de grève » dans le texte en question, « particulièrement dans le secteur agricole où les paysan.nes et les travailleurs.euses sont déjà confrontés à une précarité profonde ».
« Nous avons saisi et sollicité l’intervention des mécanismes de l’ONU afin de garantir la protection des droits des travailleurs.euses agricoles et des paysans.nes marocains », ont fait savoir les auteurs de cette démarche tout en ajoutant que leur plainte « exhorte également le gouvernement marocain à réviser cette législation pour la rendre conforme à ses engagements internationaux » en matière de droits humains et en phase avec les conventions dont le Maroc est Etat membre.
L’UMT avait estimé que la Cour constitutionnelle aurait « dû déclarer que certaines dispositions du texte contredisaient les exigences de la Constitution », notamment à travers des dispositions qui ne sont pas incluses dans le champ d’application constitutionnellement limité de la loi organique « aux conditions et aux modalités d’exercice du droit de grève ». La centrale questionne également « l’interprétation erronée des dispositions de la Constitution dans la définition de la grève » qui limite le champ d’action, en défaveur d’un droit « censé faire partie intégrante des libertés et des droits fondamentaux ».
Gilbert F. Houngbo, directeur général de l’OIT, a plutôt salué, mercredi, à Genève, l’adoption de la loi 97.15 au Maroc et sa validation par la Cour constitutionnelle. A l’issue d’un entretien avec Younes Sekkouri, ministre marocain de l’Inclusion économique, de la petite entreprise, de l’emploi et des compétences, il s’est par ailleurs félicité du dialogue social « lors du processus d’élaboration et d’adoption » du texte.
De son côté, le ministre a indiqué qu’à la faveur de l’adoption de la loi 97.15 au Parlement et sa validation par la Cour constitutionnelle, « le Maroc a franchi une étape importante dans la régulation des relations entre la classe ouvrière et les employeurs ainsi qu’au sein de la société en prévoyant le service minimum ».
La FNSA et la CETIM qui rappellent qu’au Maroc, le droit de grève « est garanti constitutionnellement depuis 1962 et a été réaffirmé dans la Constitution de 2011 (article 29) », préconisent « la mise en place de mécanismes de protection spécifiques pour les travailleurs.euses ruraux.ales du secteur informel, leur permettant d’exercer leur droit de grève sans crainte de représailles ».
Toutefois, la nouvelle loi organique a « limité » le champ de recours à la mobilisation collective, « ce qui rend difficile, voire impossible » de mener des démarches exigeant « des conditions de travail plus justes », les deux organisations. Ces dispositions sont pointées notamment au vu des « barrières administratives insurmontables » qu’elles créent, outre les « sanctions pénales disproportionnées, privant de fait un grand nombre de personnes de leur droit à l’action collective ».
A ce titre, les données de l’instance syndicale indiquent que « plus de 80% des travailleurs.euses des zones rurales sont employés dans des conditions informelles, sans contrats de travail ni protections sociales», dans un contexte de précarité où «le salaire minimum agricole (SMAG) est inférieur de 30% à celui du secteur industriel (SMIG) ». En l’espèce, la loi 97.15 « empêche toute grève spontanée et impose des procédures complexes qui excluent une majorité de la population active rurale de toute mobilisation », déplore le duo. Lequel pointe aussi la loi en tant que cadre allant « à l’encontre des principes et des dispositions de la Déclaration des Nations unies sur les droits des paysans et des autres personnes qui travaillent dans les zones rurales (UNDROP) », convention contraignante que le Maroc avait voté en 2018 à l’Assemblée générale de l’ONU. Sont cités également « le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC), ainsi que les Conventions internationales de l’Organisation internationale du travail (OIT) », ou encore « l’article 8 de l’UNDROP » qui « garantit aux travailleurs ruraux le droit à la liberté de réunion et d’expres sion, ainsi que le droit de mener des actions collectives pour défendre leurs droits ».