Pour Washington, il y a les bons et les mauvais dossiers à la Cour pénale internationale (CPI). Après la demande de mandat d’arrêt émise le 20 mai par le procureur Karim Khan contre Benjamin Netanyahou et Yoav Gallant, les États-Unis sont montés au créneau. Dans un communiqué publié dans la foulée, le président Joe Biden a fustigé une décision « scandaleuse ». « Quoi que ce procureur puisse laisser entendre, il n’y a pas d’équivalence – aucune – entre Israël et le Hamas », a-t-il martelé. Et d’ajouter : « Nous nous tiendrons toujours aux côtés d’Israël contre les menaces à sa sécurité. »
Trois cadres du mouvement gazaoui, Yahya Sinwar, son chef dans l’enclave, Ismaïl Haniyeh, chef du Hamas et Mohammed Deif, qui dirige les Brigades al-Qassam, sa branche armée, sont en effet également visés par la demande du procureur de la CPI.
Un argument aussi avancé par Antony Blinken, chef de la diplomatie américaine. « C’est une honte », a-t-il déclaré. Avant de poursuivre que « fondamentalement, cette décision n’aide en rien, et pourrait compromettre les efforts déployés actuellement pour parvenir à un accord de cessez-le-feu qui permettrait la libération des otages et l’acheminement de l’aide humanitaire, des objectifs que les États-Unis continuent de poursuivre sans relâche. »
Le président de la Chambre des représentants, l’élu républicain de Louisiane Mike Johnson, a aussi averti que celle-ci pourrait voter des sanctions contre la CPI. Ce n’est pas la première fois que de telles menaces sont proférées par les parlementaires US. Le 7 mai, Michael McCaul, élu républicain du Texas et président de la commission des Affaires étrangères de la Chambre des représentants, avait confirmé qu’à titre préventif, un texte de loi sanctionnant les fonctionnaires de la CPI était en cours de préparation si l’instance judiciaire basée à La Haye venait à émettre des mandats d’arrêt à l’encontre de B. Netanyahou.
Or, sur le dossier ukrainien, les États-Unis sont favorables à la CPI. « Concernant la question de savoir si nous continuerons ou non à fournir un soutien à la CPI en ce qui concerne les crimes commis en Ukraine, oui, nous poursuivons ce travail. », avait déclaré le 20 mai, Llyod Austin, secrétaire à la Défense des États-Unis. Des propos qui n’ont pas manqué de faire réagir Moscou. Lors d’une conférence de presse, Anatoli Antonov, ambassadeur russe aux États-Unis, a critiqué « un autre exemple de deux poids deux mesures et de l’hypocrisie américaine ». « Les autorités américaines nient la légitimité de la CPI et intimident cette structure avec des sanctions lorsqu’il s’agit des intérêts de Washington et de ses alliés », a-t-il ajouté. Le diplomate russe affirme que les États-Unis utilisent en revanche cette structure « pseudo-juridique contre leurs ennemis présumés ».
En effet, en mars 2023, un mandat d’arrêt avait été émis contre le président russe Vladimir Poutine. Dmitri Peskov, porte-parole du Kremlin, rappelant que la Russie ne reconnaissait pas la CPI, a néanmoins jugé la situation « très curieuse », notamment en raison de menaces de sanctions. Washington a signé le statut de Rome en 1998 sous la présidence Clinton, mais ne l’a jamais ratifié. Les États-Unis ne font pas partie des 123 États parties de la CPI, au même titre que la Russie, la Chine, l’Iran, l’Inde ou encore l’Arabie saoudite.