Le projet de loi baptisé “IGO Anti-Boycott Act” a été présenté en janvier par les faucons pro-israéliens du Congrès américain, le républicain Mike Lawler et le démocrate Josh Gottheimer, et a été coparrainé par 22 autres législateurs des deux principaux partis. En vertu de cette nouvelle législation, les Américains pourraient faire l’objet de poursuites pénales, de sanctions civiles ou des deux simplement pour avoir manifesté leur solidarité non violente avec les Palestiniens. Elle cherche à utiliser la loi fédérale comme une arme contre toute personne aux États-Unis choisissant d’aligner ses choix de consommation, d’investissement ou de défense des droits humains sur la condamnation internationale du régime d’apartheid et des colonies illégales d’Israël.
Sont concernées les personnes et les entreprises américaines qui boycottent des entreprises répertoriées par les Nations Unies comme faisant des affaires dans les colonies israéliennes illégales en Cisjordanie occupée. Les sanctions sont effrayantes puisqu’elles peuvent aller jusqu’à 1 million de dollars d’amendes pénales, j 20 ans de prison, 300 000 dollars d’amendes civiles et révocation des licences fédérales et des privilèges d’exportation.
Présenté à la Chambre de représentants lundi, le projet de loi s’est heurté à l’opposition des alliés du président Donald Trump, qui craignent pour leur liberté d’expression et partisans de l’« Amérique d’abord ». Selon la députée républicaine Marjorie Taylor Greene, le vote de la Chambre des représentants sur cette proposition, initialement prévu lundi, a été annulé.
« Mon travail consiste à défendre le droit des Américains d’acheter ou de boycotter qui ils veulent sans que le gouvernement ne leur inflige de lourdes amendes ou ne les emprisonne », a déclaré M.T. Greene dans une publication sur les réseaux sociaux lundi.
« Mais ce que je ne comprends pas, c’est pourquoi nous votons sur un projet de loi au nom d’autres pays et non sur des décrets présidentiels qui visent notre pays ? ».
« Les Américains ont le droit de boycotter, et sanctionner cela met en péril la liberté d’expression. Je rejette et condamne avec véhémence l’antisémitisme, mais je ne peux pas violer le Premier Amendement », a écrit la députée Anna Paulina Luna, républicaine de Floride, sur X.
Charlie Kirk, influenceur de droite, a lancé dimanche une campagne contre ce projet sur X, affirmant que « le droit de s’exprimer librement est un droit inné de tous les Américains ».
Steve Bannon, ancien conseiller de D. Trump, s’est également rallié à cette opposition.
La législation avait également été vivement critiquée par les défenseurs de la liberté d’expression et les organisations propalestiniennes. Le Conseil des relations américano-islamiques (CAIR) avait notamment dénoncé ce projet comme « une menace » pour « les droits à la liberté d’expression garantis par le Premier Amendement ».
Selon le site Middle East Eye, la réaction des personnalités conservatrices reflète une tendance croissante aux États-Unis à considérer Israël avec scepticisme, un scepticisme qui s’est intensifié depuis la guerre israélienne contre la bande de Gaza en riposte à l’attaque anti israélienne du Hamas du 7 octobre 2023. Selon un sondage Pew publié en avril, 53 % des Américains expriment désormais une opinion défavorable d’Israël, contre 42 % en mars 2022.
En annonçant, mercredi 30 avril, avoir engagé la procédure de dissolution du collectif Urgence Palestine, Bruno Retailleau, ministre français de l’Intérieur a provoqué un véritable séisme dans le monde associatif, à fortiori parmi les soutiens de la cause palestinienne.
Né au lendemain du lancement par Israël de son offensive contre les habitants de la Bande de Gaza, le collectif Urgence Palestine regroupe de très nombreux militants, dont des figures palestiniennes parmi lesquelles le charismatique Omar Al-Soumi.
Pour justifier sa volonté de mettre fin aux activités d’Urgence Palestine, B. Retailleau a fait état de sa volonté de « taper sur les islamistes ».
« L’islamisme est une idéologie qui essaie d’instrumentaliser une religion. Il y a une défiguration de la foi (…). Il ne faut pas défigurer la cause palestinienne » a-t-il fait valoir à l’antenne de CNEWS et Europe 1.
O. Al-Soumi a réagi en s’étonnant, dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux, de la démarche du gouvernement français. « À l’heure où le peuple palestinien fait face au génocide, à la famine, à l’heure où ils veulent détruire, anéantir le peuple Palestinien, que fait le gouvernement français ? Il veut dissoudre notre collectif, c’est insupportable! », a-t-il lancé.
De fait, Urgence Palestine a annoncé par la voix de ses avocats, Maîtres Vincent Brengarth, Elsa Marcel et William Bourdon, qu’une procédure allait être engagée afin de contester la dissolution du collectif.
Dans un communiqué de presse transmis à Anadolu par l’un des avocats, ces derniers estiment que l’initiative de B. Retailleau porte « une atteinte grave à la liberté d’association mais également à la liberté d’expression, dans un contexte où elles devraient au contraire plus que jamais être garanties au vu de la situation à Gaza ».
« Cette mesure, totalement infondée, s’inscrit dans un mouvement de criminalisation des soutiens à l’encontre de la Palestine » et « est d’autant plus grave alors que les massacres se poursuivent, plongeant Gaza dans une crise humanitaire sans précédent, Volker Türk, le haut-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme ayant encore rappelé, le 29 avril 2025, ‘Israël semble infliger aux Palestiniens à Gaza des conditions de vie de plus en plus incompatibles avec leur existence continue en tant que groupe à Gaza’ », est-il noté.
S’agissant des activités du collectif, les trois avocats parisiens soulignent qu’Urgence Palestine est « une organisation politique fondée par des Palestiniens en exil avec leurs alliés engagés contre le génocide à Gaza, le colonialisme et l’apartheid » et qu’elle « organise des manifestations, des conférences, des évènements culturels, des formations et rassemble plusieurs milliers de citoyens de tous les horizons dans plus de 20 groupes locaux ».
Le collectif a lui-même réagi dans un billet publié en ligne et dans lequel il accuse le gouvernement de se livrer à « une attaque à l’encontre des droits démocratiques les plus élémentaires ».
« L’Etat cible nos positions de soutien à l’auto-détermination du peuple palestinien. Or ces dernières sont conformes aux au droit international. Tenter de les criminaliser et aller jusqu’à dissoudre notre organisation est une entrave grave à la liberté d’expression et à la liberté d’association », pointe l’ONG qui organise un meeting de soutien mercredi 6 mai à Paris, en présence notamment de Jean-Luc Mélenchon, chef de file de LFI.
Une pétition a, par ailleurs, été mis en ligne pour dire « non à la dissolution d’Urgence Palestine » et recueille à ce stade près de 35 000 signatures de soutien dont celles de l’eurodéputée Rima Hassan, des humoristes Guillaume Meurice et Blanche Cardin, ou encore des artistes, Médine et Joey Starr.