« Nous appelons à tourner cette page tragique de l’histoire et, aussi difficile que ce soit, à commencer progressivement – étape par étape – à rétablir des relations de confiance et de bon voisinage entre la Russie et l’Ukraine et de manière générale en Europe. » Dans un discours devant les cadres du ministère russe des Affaires étrangères, le maitre du Kremlin a déclaré que les autorités russes étaient prêtes « à entamer des négociations » avec l’Ukraine dès lors que celle-ci aura procédé à un « retrait complet de ses troupes des Républiques populaires de Donetsk (RPD) et de Lougansk (RPL), des régions de Zaporojié et de Kherson, et lancera réellement ce processus ». Kiev doit également accepter les positions de principes de Moscou, à savoir « le statut neutre – non aligné, non nucléaire – de l’Ukraine, sa démilitarisation et sa dénazification », a précisé le président russe.
À ces critères, annoncés lors du déclenchement de l’offensive russe, s’ajoutent « la garantie des droits et des libertés » des citoyens russophones et la « prise en compte des nouvelles réalités territoriales », à savoir la reconnaissance de la Crimée et des Républiques populaires de Donetsk et de Lougansk, des régions de Kerson et de Zaporojié comme parties intégrantes de la Russie.
« Tous ces principes de bases doivent être entérinés sous la forme d’accords internationaux fondamentaux », a stipulé le président russe. « Cela implique naturellement la levée de toutes les sanctions occidentales contre la Russie », a-t-il ajouté. L’ « essence » de cette proposition, a souligné V. Poutine, « n’est pas une trêve temporaire ou un cessez-le-feu comme le veut l’Occident » afin de réarmer les forces ukrainiennes. « Je le répète, il ne s’agit pas d’un gel du conflit, mais de sa fin définitive », a-t-il insisté.
Plus tôt, lors de son intervention, V. Poutine avait réitéré que la Russie avait jusqu’au déclenchement de son offensive en février 2022 espéré que le conflit ukrainien serait résolu de manière pacifique, ajoutant que toutes les propositions russes avaient été rejetées. « La Russie n’a pas déclenché la guerre », a souligné le président russe. « C’est le régime de Kiev qui, après que les habitants d’une partie de l’Ukraine, conformément au droit international, ont déclaré leur indépendance, a lancé les hostilités et les poursuivent : c’est ça l’agression ! », a-t-il poursuivi, ajoutant que Moscou espérait que « les intérêts et les exigences légitimes » du Donbass, le « statut spécial de ces régions et les droits fondamentaux » de ses habitants soient inscrits dans la constitution ukrainienne « sans violer l’unité territoriale de l’Ukraine ».
Les revendications de V. Poutine, se « heurtent au bon sens », a estimé Mykhailo Podoliak, conseiller à la présidence ukrainienne cité par l’AFP. « Il faut se débarrasser de ces illusions et cesser de prendre au sérieux les « propositions de la Russie » qui se heurtent au bon sens », a-t-il jugé sur X .
Lloyd Austin n’a pas manqué de réagir, non plus, en assurant que V. Poutine n’est pas dans une position qui lui permet de dicter quoi que ce soit à l’Ukraine.
Côté russe, la défense antiaérienne a abattu dans la nuit 87 drones ukrainiens, dont 70 ont visé la région méridionale de Rostov, qui abrite notamment le QG de l’opération russe en Ukraine.
« Pendant la nuit, une tentative du régime de Kiev de commettre une attaque terroriste avec des drones aériens […] a été empêchée », a indiqué, vendredi 14 juin, le ministère russe de la Défense dans un communiqué. « Au total, 87 drones ukrainiens ont été abattus au-dessus des régions russes », a-t-il précisé.
« Les systèmes de défense antiaérienne ont intercepté et détruit des drones au-dessus de la région de Belgorod (2 appareils), de Volgograd (2 appareils), de Voronej (6 appareils), de Koursk (6 appareils), de Rostov (70 appareils), ainsi qu’un drone au-dessus de la péninsule de Crimée ».
Dans la région de Rostov, qui abrite le QG de l’opération russe en Ukraine, l’attaque « n’a pas fait de victimes », mais a provoqué des coupures d’électricité dans plusieurs localités, a précisé pour sa part le gouverneur régional Vassili Goloubev sur Telegram. Dans la région de Voronej, frontalière de l’Ukraine, « un réservoir d’un dépôt de pétrole a été légèrement endommagé » à la suite de la retombée des débris de drones, selon le gouverneur régional Alexandre Goussev. L’attaque n’a pas provoqué d’incendie, a-t-il assuré sur Telegram.
L’armée de l’air ukrainienne a, elle, annoncé avoir détruit quatorze missiles et dix-sept drones russes au cours de la nuit.
Une nouvelle vague de frappes était aussi en cours dans la matinée, avec des missiles Kinjal survolant la région de Kiev et se dirigeant vers celle de Khmelnytsky, plus à l’ouest, selon le gouverneur russe Alexandre Goussev. La région de Khmelnytsky comporte un aérodrome militaire visé à de multiples reprises par la Russie.
Les deux pays ont intensifié leurs attaques aériennes transfrontalières ces derniers mois, Kiev ciblant les raffineries et les dépôts de carburant russes et Moscou visant les centrales électriques et les installations de stockage de gaz ukrainiennes. Kiev avait promis de porter les combats sur le sol russe en représailles aux nombreux bombardements sur son territoire.
A rappeler que Dmitri Peskov, porte-parole du Kremlin, a estimé jeudi « peu probable » qu’une obligation au sein de l’OTAN d’aider l’Ukraine change la donne sur le terrain. Jens Stoltenberg a envisagé de transformer les « contributions volontaires » des membres de l’OTAN envers Kiev en « engagements ». Une perspective qui n’a pas manqué de déplaire à la Hongrie de Viktor Orban.
Le 12 juin, lors d’une conférence de presse, le secrétaire général de l’OTAN a plaidé pour un « rôle plus fort » de l’Alliance afin d’offrir à l’Ukraine « la prévisibilité dont elle a besoin ». S’il a déclaré avoir apprécié les efforts des États membres en faveur de l’Ukraine, Jens Stoltenberg a notamment pointé du doigt les mois de blocage au Congrès des États-Unis d’une enveloppe comprenant 61 milliards de dollars d’aide militaire supplémentaire à Kiev, ainsi que « certaines des promesses faites par les alliés européens » qui « n’ont pas été tenues ». «Si nous transformons cela non pas en contributions volontaires, mais en engagements au sein de l’OTAN, cela deviendra bien sûr plus solide, plus fiable », a-t-il ajouté auprès des journalistes.
Une « prévisibilité » pour laquelle J. Stoltenberg avait déjà plaidé, la veille, auprès de l’agence Bloomberg, annonçant qu’il allait proposer aux ministres de la Défense de l’Alliance un « engagement » annuel de 40 milliards d’euros «minimum» pour l’Ukraine. « Nous devons maintenir ce niveau de soutien comme un minimum et aussi longtemps qu’il le faudra », a-t-il réitéré, lors de la conférence de presse du 12 juin. Conférence qui précédait la rencontre à Bruxelles, les 13 et 14 juin, des ministres de la Défense de l’OTAN.