La Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) bénéficiera en 2025 d’un budget historique de 1,066 milliard d’euros, ce qui constitue une augmentation de 8 % par rapport à 2024. Selon les informations rapportées par Challenges, cette enveloppe, qui reflète un effort budgétaire inédit, s’inscrit dans une stratégie de renforcement des capacités françaises en matière de cybersécurité, d’intelligence artificielle et de renseignement numérique. Depuis 2018, le budget de cette officine a augmenté de 33 %, suivant la priorité donnée au renseignement par le Livre blanc sur la défense de 2008 et les orientations d’Emmanuel Macron depuis son arrivée à l’Élysée​. L’un des principaux postes de dépenses de la DGSE est également son futur déménagement vers le Fort Neuf de Vincennes, prévu pour 2030. Ce projet colossal, estimé à 1,34 milliard d’euros, vise à créer un complexe de 160 000 mètres carrés pour regrouper les activités du service aujourd’hui dispersées dans Paris​.

Selon le ministère des Armées, ces nouveaux moyens permettront notamment de financer des investissements technologiques majeurs : supercalculateurs, outils de lutte informatique offensive (LIO) et équipements d’interception électromagnétique. La DGSE, dirigée par Nicolas Lerner depuis janvier 2024, prévoit également de recruter 170 nouveaux agents, en particulier des spécialistes du cyber. Les effectifs du service devraient atteindre 6 100 agents en 2025, contre 4 400 en 2008​.

Cette augmentation de budget soulève également des interrogations sur les priorités géopolitiques de la France. Alors que les troupes françaises se retirent progressivement du Sahel sous la pression des gouvernements locaux, la DGSE se dote de nouveaux outils pour maintenir une influence discrète sur le continent africain. À travers des campagnes d’influence numérique sur les réseaux sociaux et des opérations de renseignement, la France semble vouloir se repositionner face à d’autres pays concurrents qui opèrent au Mali et en République centrafricaine. L’utilisation du cyberespace comme champ de bataille illustre cette évolution. Plutôt que des interventions militaires classiques, Paris pourrait intensifier ses opérations d’influence numérique et d’interceptions ciblées dans les zones où il cherche à préserver ses intérêts stratégiques. Certains observateurs pointent le risque de voir se développer des campagnes de manipulation visant à influencer l’opinion publique locale ou déstabiliser des gouvernements hostiles aux intérêts français​. Malgré cette augmentation budgétaire, la DGSE reste moins bien dotée que ses homologues britanniques ou allemands. Le BND allemand disposera d’un budget de 1,19 milliard d’euros en 2025, tandis que les agences britanniques MI5-MI6-GCHQ bénéficient d’un budget cumulé de près de 4,8 milliards d’euros. Selon Bernard Emié, ancien directeur de la DGSE, le service français reste encore en sous-effectif par rapport à ces agences, malgré l’augmentation prévue du nombre d’agents.

Déconvenues en Afrique

Le média ouest-africain AES Info a révélé le 28 octobre qu’une « opération secrète » menée par la France a été démasquée au Sahel. Le média dit avoir identifié des agents français et affirme que Paris entend déstabiliser les trois pays alliés. « Un réseau complexe, utilisant de fausses ONG »: c’est ainsi que le média sahélien décrit ce qu’il nomme une « opération secrète » menée par la France au Niger et ayant des ramifications au Bénin, au Tchad et dans plusieurs autres pays d’Afrique de l’Ouest.

Le média, créé à l’initiative des pays de l’Alliance des États du Sahel (AES), c’est-à-dire le Burkina Faso, le Mali et le Niger, dévoile les noms de personnes qu’il identifie comme des agents et informe également de la construction de camps militaires français dans la région. Le média révèle le nom de plusieurs personnes qui auraient participé à ces opérations. Toujours en ayant recours au conditionnel, il évoque le nom de Thomas Giozzo qui serait un officier de liaison de la DGSE ayant travaillé à l’ambassade de France à Niamey avant les évènements du 26 juillet 2023, c’est-à-dire la destitution du président Mohammed Bazoum. Sont ensuite énumérés les noms de Français qui auraient été identifiés comme travaillant au Sahel sous fausse identité à la frontière béninoise ou encore au Tchad et au Nigéria. Ces agents auraient, selon AES Info, mis en place un réseau complexe, utilisant de fausses ONG comme couverture pour leurs activités.

Le média les accuse par ailleurs d’avoir fourni du matériel militaire et de communication à des organisations terroristes notamment Boko Haram. Leur activité consisterait également à financer des groupes armés pour que ceux-ci s’installent dans des zones critiques et provoquent des crises humanitaires, permettant ainsi à des « ONG fictives d’intervenir et de fournir une couverture logistique ». Le documentaire présenté par l’AES explique en outre que la France construirait deux camps au Nigeria, à Guigani et Garingata, où « seront approvisionnés » en armement les « terroristes de la forêt » de Sarma puis ceux de la zone des trois frontières. Enfin une autoroute logistique de Kandi à Sokotto aurait été prévue dans le but d’attaquer simultanément des zones dans les trois pays de l’AES.

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