« La famine est imminente » a déclaré Edem Wosornu, directrice des opérations d’Ocha, bureau de coordination des Affaires humanitaires de l’ONU, devant le Conseil de sécurité. Les Nations unies ont déjà identifié 41 foyers d’insécurité alimentaire aigüe et aujourd’hui près de 5 millions de Soudanais sont menacés par la faim. « Plus de 7 000 jeunes mères risquent de mourir », ajoute E. Wosornu, si elles ne peuvent avoir accès aux soins et à la nourriture dans les prochaines semaines.
Et la situation ne fait qu’empirer à mesure que le conflit s’étend. Source d’inquiétude majeure aujourd’hui : la ville d’El Fasher, dernier bastion de l’armée au Darfour, assiégée depuis des semaines par les Forces de soutien rapide. Le ministre de la Santé du Darfour du Nord, a confié au Sudan Tribune, que près de 350 personnes ont été tuées et près de 2 200 blessées, depuis le début des combats, le 10 mai. El Fasher abrite près de 800 000 déplacés. Son siège complique nettement la réponse humanitaire, déjà sous-financée. Selon Ocha, seuls 16% des besoins sont aujourd’hui couverts. « C’est une guerre qui ne peut pas être gagné sur le champ de bataille. Et donc, il faut essayer de ramener les parties autour d’une table. Il me semble que toutes les tentatives qui ont été faites n’ont abouties à rien », a indiqué Filippo Grandi, Haut-commissaire des Nations unies pour les réfugiés (HCR). F. Grandi s’est rendu au Soudan du Sud pour rencontrer des civils qui ont fui le Soudan voisin. « À Kosti, j’ai rencontré des personnes récemment déplacées de Kordofan, où la guerre du Soudan fait rage, terrorisant les civils et les obligeant à fuir. Leurs récits de violence et d’abus sont des témoignages douloureux du mépris total des règles de la guerre par les parties à ce conflit », a-t-il déclaré sur son compte X ce 18 juin.
Une semaine à peine après avoir réclamé un cessez-le-feu, inquiets des conséquences qu’aura un siège prolongé d’el-Fasher au Soudan, les ambassadeurs du Conseil de sécurité se sont fait briefer sur les dernières avancées de cette guerre qui oppose le général al-Burhan à son ancien adjoint devenu rival le général Daglo.
À la table du Conseil, l’assistante du secrétaire général à l’Afrique a redit la faillite des négociations pour enrayer l’escalade de la violence qui paralyse le pays. Les combats se sont intensifiés autour de Khartoum, des régions Kordofan et Gezira. Partout, le respect des droits humains régresse. Et l’ONU condamne précisément l’attaque de l’hôpital au sud d’el-Fasher, par les Forces de soutien rapide (FSR) du général Daglo, alias Hemedti, il y a 10 jours. C’était le principal centre hospitalier vers lequel les civils pouvaient se tourner.
Au-delà du constat d’enlisement, l’ambassadeur soudanais a profité de la réunion pour accuser en toutes lettres les Emirats arabes unis de la poursuite de la guerre dans son pays – en soutenant les FSR, les armant et en envoyant des mercenaires déjà présents au Sahel, selon lui.
Le Soudan avait demandé il y a deux mois une réunion d’urgence du Conseil sur ces accusations, mais sa requête n’avait pas été entendue. De son côté, l’ambassadeur émirati a rejeté en bloc ces accusations qu’il a qualifiées de « ridicules ». L’ONU espère voir des avancées lors de la retraite pour les médiateurs à ce conflit qui se tiendra à Djibouti le mois prochain.