Lors d’une intervention devant la Commission des finances, de la planification et du développement économique à la Chambre des conseillers, Fouzi Lekjaa a souligné que lier chaque investissement public à de nouveaux recrutements relève d’une vision irréaliste. Il a en ce sens appelé à privilégier une gestion efficace des ressources et à renforcer le rôle des collectivités locales et des associations dans la gestion des projets. « Si nous comptons sur la création d’emplois, ce sont l’économie et les taux de croissance qui en constituent les principaux déterminants. Quant aux recrutements, ils sont liés à des fonctions spécifiques dans le cadre des secteurs concernés », a-t-il fait valoir vendredi lors de la discussion du projet de loi de finances 2025.
Cette déclaration intervient alors que plusieurs conseillers parlementaires ont exprimé leurs inquiétudes face à la baisse du nombre de postes budgétaires attribués à certains ministères. Khalid Sati, représentant de l’Union nationale du travail au Maroc (UNTM), a évoqué une réduction globale de 1.128 postes cette année, alors qu’une augmentation était attendue. Il a également souligné que le ministère de l’Emploi, confronté à un déficit critique d’inspecteurs du travail, ne dispose que de 60 nouveaux postes cette année, contre un chiffre supérieur l’année précédente.
F. Lekjaa a tenu, en réaction, à relativiser ces chiffres en mettant en avant les efforts réalisés par les établissements publics liés aux départements ministériels. Il a cité, par exemple, la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS), qui a créé 500 emplois, ainsi que les Centres régionaux d’investissement, générant chacun entre 20 et 30 postes selon les besoins.
Sur la question sensible des enseignants cadres des Académies, souvent au cœur des débats, le ministre a apporté des précisions. « Pour mettre fin à ce débat, nous ne parlons plus de multiples systèmes, mais d’un seul cadre unifié englobant tous les employés de l’éducation. L’entité organisant le concours n’est plus un problème, l’essentiel est de savoir comment gérer le parcours de ces enseignants, ce qui posait auparavant des difficultés », a-t-il expliqué.
F. Lekjaa a insisté sur l’importance de la régionalisation pour répondre aux besoins spécifiques de chaque territoire, citant en exemple les réformes en cours au sein du ministère de la Santé. Ce dernier adopte désormais des regroupements territoriaux pour mieux adapter le recrutement et la formation aux nécessités locales. De même, les concours de recrutement sont désormais organisés au niveau régional, une méthode que le responsable estime essentielle pour optimiser les ressources humaines.
Répondant aux critiques sur la dépendance excessive aux associations pour la gestion de certains projets, comme les maisons de jeunes ou les centres culturels, F. Lekjaa a défendu une approche pragmatique. « Il est irréaliste de continuer à lier les investissements de l’État à l’obligation de fournir du personnel pour chaque projet. On ne peut pas construire une piscine ou un terrain de sport et dire ensuite qu’il faut des employés pour les gérer. Ce qu’il faut, ce sont des mécanismes de gestion efficaces », a-t-il soulevé. Il a proposé des alternatives, telles que la délégation de certains projets aux collectivités locales ou à des associations, dans le cadre d’un rôle renforcé pour la société civile. Selon lui, il est inadmissible de conditionner chaque investissement public à la création de nouveaux postes, sans prendre en compte les besoins réels et les mécanismes de gestion.
Le ministre délégué a également insisté sur la nécessité de rationaliser les créations de postes budgétaires. « Il ne s’agit pas seulement de créer un certain nombre de postes, mais de faire preuve de volonté pour les utiliser efficacement afin de répondre aux missions requises. On peut créer 3 000 postes ou plus, mais sans une gestion adéquate, ces postes resteront sans impact concret », a-t-il fait valoir. Il a tracé les grandes lignes d’une approche plus pragmatique et ciblée en matière d’emploi et de gestion des ressources publiques, en insistant sur l’importance de coordonner les efforts entre économie, croissance et efficacité administrative.