« Je signerai dans quelques instants le décret de convocation des élections législatives qui se tiendront le 30 juin pour le premier tour et le 7 juillet pour le second », a déclaré Emmanuel Macron, prenant acte que près de 40% des suffrages ont été en faveur des partis d’extrême droite dont 31,5% pour le Rassemblement national emmené par Jordan Bardella, 28 ans.

« Cette décision est grave, lourde, mais c’est avant tout un acte de confiance », a-t-il souligné, disant sa « confiance (…) en la capacité du peuple français à faire le choix le plus juste pour lui-même et pour les générations futures ». « Que la parole soit donnée au peuple souverain », a-t-il lancé. « Rien n’est plus républicain ». Il a ajouté que la France avait « besoin d’une majorité claire pour agir dans la sérénité et la concorde » et a souligné avoir « entendu » le message des Français et leurs préoccupations. « Je ne les laisserai pas sans réponse », a-t-il assuré.

Marine Le Pen a réagi dans la foulée en assurant que son camp était prêt« à exercer le pouvoir si les Français nous font confiance ».  La dirigeante d’extrême droite arrivé deux fois derrière le président Macron aux présidentielles de 2017 et 2022, et qui vise l’échéance de 2027, a-t-elle l’occasion pour prendre, enfin, sa revanche ? L’extrême droite emmenée par J. Bardella a remporté dimanche les élections européennes en France, très loin devant la liste du camp du président, arrivée deuxième mais talonnée par les sociaux-démocrates. Avec 15,2% des voix, le camp présidentiel a été largement distancé par l’extrême droite qui rallie plus du double des voix (31,5% à 32,4%), selon des estimations publiées dimanche soir par les instituts de sondage Ipsos et Ifop. C’est un échec cuisant pour la majorité macroniste qui, en 2019, n’était distancée que d’un seul point par le Rassemblement national (23,34 % pour le RN contre 22,42 % pour la majorité). En outre, la candidate macroniste Valérie Hayer sauve certes la deuxième place mais d’une courte tête, la liste sociale-démocrate menée par Raphaël Glucksmann, 44 ans, ayant rallié 14% des suffrages, selon ces estimations.

La victoire de l’extrême droite était attendue: le jeune Bardella – 28 ans – , qui avait fait campagne sur les thèmes de l’immigration, de la sécurité et du pouvoir d’achat, avait en effet caracolé en tête pendant toute la campagne, loin devant V. Hayer, 38 ans. Avec ses formules travaillées, son aisance médiatique, il a su s’imposer en moins de cinq ans dans un paysage politique français en plein renouvellement, et a poursuivi la stratégie de dédiabolisation du parti de l’extrême droite française, entamée il y a une décennie par M. Le Pen.

Inconnue du grand public, la tête de liste Renaissance, V. Hayer, eurodéputée sortante, a peiné pendant la campagne malgré sa solide connaissance des dossiers européens. Raphaël Glucksmann, pro-européen s’est, lui, clairement positionné sur une ligne de « rupture » à celle de la gauche radicale de Jean-Luc Mélenchon. Il s’est dit « fier » de sa troisième place aux élections européennes mais n’a « pas l’âme à la fête » du fait du score des listes d’extrême droite. « Aujourd’hui, l’extrême droite représente 40% en France », a-t-il déploré devant ses partisans, évoquant « une vague qui ébranle profondément nos démocraties ». « Nous leur tiendrons tête en Europe », a-t-il martelé dans son discours à son QG de campagne. « Nous, l’extrême droite, nous ne jouons pas avec à chaque scrutin, nous la combattons jour après jour », a martelé l’eurodéputé. « Nous leur tiendrons tête, nous leur tiendrons tête en Europe et nous tiendrons tête en France. Avec nous, il n’y aura pas de tergiversation », a-t-il déclaré.

Avec ce score, « ce que nous allons faire émerger, c’est un nouvel espace politique », a jugé le nouvel homme fort de la gauche, en le définissant comme « une nouvelle manière de faire de la politique fondée sur la clarté et la sincérité, sur le refus des outrances, le refus des calomnies, le refus de la violence ». « La démocratie est notre bien le plus cher et la démocratie s’affaisse et s’érode quand on ne la cultive pas, quand on ne la défend pas, quand on ne la fait pas vivre », a estimé R. Glucksmann. Il n’a eu de cesse aussi de présenter son parti comme une alternative possible au « duel mortifère » entre l’extrême droite et le parti macroniste.

En revanche, les Verts, qui avaient obtenu un score historique de 13,4% en 2019, s’écroulent tout en restant légèrement supérieur à 5%, le seuil minimum pour obtenir des eurodéputés en France.

Les élections européennes en France auront aussi été marquées par une poussée relative de la gauche radicale représentée par La France insoumise (LFI) et Manon Aubry : 8,7% contre 6,3% des voix en 2019. LFI avait multiplié les coups d’éclat sur le soutien aux Palestiniens de Gaza, pour tenter de mobiliser un électorat jeune et aller au-delà des enquêtes la plaçant autour de 8,5 %. Ainsi, Rima Hassan, juriste encore inconnue du grand public il y a quelques mois devenue nouvelle égérie de LFI, a été élue au Parlement européen.

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