Le 1er novembre dernier, un jet privé Falcon, immatriculé P4-RMA, a décollé de Dubaï et atterri à l’aéroport Ben-Gourion à Tel-Aviv. L’avion est resté au sol environ une heure et demie puis a poursuivi sa route vers sa destination finale: la Libye. Un itinéraire étrange, étant donné que la Libye, en proie au chaos depuis dix ans, n’a pas de relations avec Israël.
À bord de cet avion se trouvait Saddam Haftar, fils du maréchal Khalifa Haftar, révèle dimanche le journal israélien Haaretz. Le jeune militaire y aurait rencontré des officiers du département Tevel, de l’agence de renseignement du Mossad, chargé de traiter les affaires avec des pays qui n’ont pas de relations avec Israël. D’après le quotidien, Haftar fils aurait été missionné par son père, chef de l’Armée nationale libyenne (ANL), pour négocier une aide militaire et politique d’Israël. En échange, si le camp Haftar gagne les présidentielles programmées pour le 24 décembre, et arrive à la tête du gouvernement d’unité et de réconciliation nationale qui sortira du scrutin, il établirait des liens diplomatiques avec l’entité sioniste.
Pour le chercheur Riadh Sidaoui, directeur du Centre arabe de recherches et d’analyses politiques et sociales (Caraps), ce projet de l’homme fort de l’Est libyen est surtout un moyen d’obtenir l’appui de Washington. « Ça devient un classique chez les dirigeants arabes: quand l’un d’eux cherche un soutien ou veut améliorer ses relations avec les États-Unis, il passe par Israël », explique-t-il.
Celui-ci en veut pour preuve les récentes normalisations entre plusieurs pays du Golfe et Israël. Les démarches ont été « très bien accueillies » à Washington, rappelle-t-il. Le Bahreïn, les Émirats arabes unis et le Maroc bénéficient tous de bonnes relations avec les États-Unis. Les chefs d’État et élus américains, Démocrates comme Républicains, saluent dans leur écrasante majorité les efforts de ces pays arabes. Car c’est une normalisation avec « l’allié le plus proche des États-Unis au Moyen-Orient. »
À quelques jours d’un sommet décisif à Paris sur la Libye, le 12 novembre, le camp Haftar chercherait donc à gagner des points vis-à-vis des États-Unis. Kamala Harris, vice-présidente des États-Unis, fera partie de la délégation de poids qui se rendra dans la capitale française.
De son côté, Israël a tout à gagner de cette situation. Selon le chercheur, Tel-Aviv chercherait à mettre en confiance d’autres acteurs avec qui il pourrait dans le futur normaliser ses relations.
R. Sidaoui rappelle que, il y a un an, les Israéliens avaient ébruité l’information selon laquelle Mohammed ben Salmane avait accueilli en Arabie saoudite le Premier ministre Netanyahou. La fuite s’inscrivait dans cette même logique. Embarrassé, le royaume, gardien des lieux saints de l’Islam, avait alors opposé un démenti de circonstance.
Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que S. Haftar rencontre les renseignements israéliens. En avril, le Washington Free Beacon révélait qu’une entrevue avait réuni les services hébreux et le fils du maréchal. Là-aussi, il aurait été question d’une candidature Haftar pour les élections de décembre 2021.
Pour K. Haftar, le pari est risqué. En effet, si les retombées internationales pourraient servir ses ambitions politiques, les conséquences au niveau national pourraient être désastreuses. « Khalifa Haftar risque d’être gêné par la publication de cette information. Beaucoup de ses officiers sont d’anciens officiers de Mouammar Kadhafi, formés en URSS. Ils sont hostiles à l’État d’Israël. Son armée pourrait ainsi exploser de l’intérieur », affirme le directeur du CARAPS.
Il y aurait également un risque électoral selon le même analyste. « Les tribus libyennes, et le peuple libyen en général, rejettent une normalisation avec Israël. » Or, à un mois d’une élection cruciale, il convient de ne pas prêter le flanc aux attaques des rivaux. Toutefois, l’homme fort de l’Est libyen ne serait pas le seul architecte de cette stratégie pro-israélienne. « Les Émirats arabes unis, voire l’Égypte, ont certainement dû jouer un rôle dans ce rapprochement entre le camp Haftar et Israël », estime R. Sidaoui.
En effet, sur le théâtre libyen, ces deux pays ont été les principaux parrains régionaux du camp Haftar. Or il se trouve que tous deux entretiennent de bonnes relations avec Israël. Abou Dhabi a normalisé ses relations avec l’État juif en 2020.
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