« Le commandement a décidé de se replier sur des positions plus sûres et mieux préparées », a admis ce 4 juillet, à la télévision ukrainienne, Nazar Volochyne, porte-parole du groupement des troupes ukrainiennes dans la zone de Tchassov Iar, cité par l’AFP. Les forces russes avaient annoncé la veille avoir chassé les troupes ukrainiennes d’un premier quartier de la ville stratégique de Tchassov Iar. D’âpres combats se déroulent depuis le mois d’avril dans cette nouvelle ville forteresse. Située en hauteur, son contrôle ouvrirait de nouvelles perspectives à l’armée russe, notamment vers Kramatorsk, la plus grande cité minière de la région de Donetsk et autre bastion des troupes ukrainiennes.

« Le commandement russe est maintenant confronté à la tâche de traverser le canal et de consolider ses positions sur la rive ouest », a expliqué le 3 juillet au soir le média russe Rybar, soulignant que ce canal passait sous terre à plusieurs endroits.
« Les dernières positions contrôlées par les forces armées ukrainiennes dans les immeubles de grande hauteur au sud-ouest du quartier avaient été soumises à des frappes massives d’artillerie, d’aviation et de systèmes de lance-flammes lourds pendant plusieurs jours », a aussi fait remarquer Rybar, avant d’ajouter que « le retrait des formations ukrainiennes n’était plus qu’une question de temps. »

« Il n’était plus opportun de tenir le quartier de Kanal, dans lequel l’ennemi avait pénétré, car cela menaçait la vie et la santé des soldats. Les positions de nos défenseurs ont été détruites », a encore expliqué N. Volochyne, soulignant que les troupes russes maintenaient leur pression par des attaques sur la deuxième moitié de la ville, située de l’autre côté du canal. L’armée ukrainienne a rapporté avoir enregistré « 238 bombardements » dans la zone de Tchassov Iar au cours des dernières 24 heures. « La plupart des tirs d’artillerie visaient la partie sud de la ville », a-t-il assuré.

La Russie maintient une pression constante depuis la fin de l’hiver sur la quasi-totalité du front. L’armée russe a lancé le 10 mai dernier une offensive dans la région de Kharkov, bousculant les lignes de défense ukrainiennes. Kiev a annoncé avoir stabilisé la situation au mois de juin, mais a dû dépêcher des troupes dans le secteur menacé, au risque d’étirer ses lignes de défense. Les troupes ukrainiennes, en difficulté croissante depuis l’échec de leur contre-offensive à l’été 2023, manquent notamment d’hommes et de munitions.
En outre, l’armée russe a indiqué aussi avoir détruit un avion de combat MiG-29 lors d’une frappe de missile balistique Iskander sur une base aérienne ukrainienne dans la région de Dnipropetrovsk, dans le centre-est de l’Ukraine. L’armée russe a publié des images de la frappe sur un appareil au sol, prises d’un drone observateur. Selon Rybar, l’appareil ukrainien touché venait d’être ravitaillé après son arrivée. Il était abrité par des conteneurs pour le protéger des drones, une protection insuffisante face à une frappe balistique.
La Défense russe multiplie depuis trois jours les annonces de frappes contre les capacités aériennes ukrainiennes. Le 2 juillet, elle a rapporté avoir détruit cinq avions de combat Su-27 sur un aérodrome dans la région de Poltava, puis un Mi-24 le lendemain, dans la même région. Ces frappes ciblées visant les aérodromes ukrainiens surviennent alors que Kiev attend la livraison d’avions de combat F-16, et suscite de vives inquiétudes en Occident et en Ukraine sur la capacité réelle de l’armée ukrainienne à les protéger.

Petits pas…

Sur le plan diplomatique, le Kremlin ne ferme pas ses portes à une ouverture américaine sur le dossier ukrainien. « Monsieur Trump, en tant que candidat à la présidence, dit qu’il est prêt et a la volonté d’arrêter la guerre en Ukraine. Nous considérons tout cela très sérieusement », a déclaré Vladimir Poutine au cours d’une conférence de presse à l’issue du sommet de l’OCS à Astana. « Bien entendu, je ne connais pas ses éventuelles propositions pour faire cela. C’est bien sûr une question clé. Mais je ne doute pas qu’il dise cela sincèrement. Et nous soutiendrons cela », a poursuivi le maitre du Kremlin. À maintes reprises depuis le printemps 2023, Donald Trump a affirmé qu’il mettrait fin « en 24 heures » au conflit s’il remportait la présidentielle américaine de novembre prochain. Il a réitéré son argument la semaine passée, lors de son débat face à Joe Biden, affirmant que si un président « respecté par Poutine » avait été au pouvoir en février 2022, ce dernier « n’aurait jamais envahi l’Ukraine ».

Le 25 juin, Reuters révélait que deux conseillers de D. Trump lui avaient présenté un plan visant à pousser l’Ukraine vers des négociations de paix avec la Russie, au risque de voir le soutien militaire américain se tarir. De son côté, V. Poutine a souligné l’incertitude de la situation américaine, déclarant attendre les résultats de l’élection présidentielle et « l’état d’esprit et les orientations de la future administration » avant toute reprise d’un dialogue sur « la stabilité stratégique ».

Plus tôt dans la journée, lors d’une réunion des chefs d’État de l’OCS, le président russe avait soutenu que l’accord provisoire conclu lors des discussions à Istanbul au printemps 2022 pourrait servir de base pour de nouvelles négociations. En avril 2022, quelques semaines après le début de l’intervention russe en Ukraine, les délégations russes et ukrainiennes furent sur le point de signer un accord de paix à Istanbul, Kiev s’engageant à une « neutralité permanente ». David Arakhamia, chef de la délégation ukrainienne, avait évoqué la pression occidentale, notamment du Premier ministre britannique Boris Johnson, qui aurait conseillé à Kiev de « continuer à se battre ».

Kiev n’exclut pas des pourparlers de paix avec Moscou, mais ceux-ci ne peuvent avoir lieu que par des intermédiaires, a déclaré le 30 juin Volodymyr Zelensky au Philadelphia Inquirer. Il a suggéré que le format utilisé pour négocier l’accord céréalier de la mer Noire de 2022, aussi obtenu sous les auspices de la Turquie et de l’ONU, pourrait servir de base à des négociations ciblées, sur « l’intégrité territoriale, l’énergie et la liberté de navigation ». Reste que Kiev a pris un décret en 2022 proclamant « l’impossibilité » de pourparlers avec Moscou tant que V. Poutine serait au pouvoir.

De retour d’Astana ce 4 juillet, Dmitri Peskov, porte-parole du Kremlin, a estimé devant la presse que l’Ukraine avait résolument rejeté le plan de paix de V. Poutine, et que « pour le moment », « ni Erdogan ni personne d’autre ne peut jouer le rôle de médiateur ».

 Dans un discours de politique étrangère prononcé le 14 juin, le chef de la fédération de Russie a déclaré que les autorités russes étaient prêtes à entamer des négociations avec l’Ukraine dès lors que celle-ci retirerait ses troupes des Républiques populaires de Donetsk (RPD) et de Lougansk (RPL) ainsi que des régions de Zaporojié et de Kherson, et accepterait d’opter pour un « statut neutre – non aligné, non nucléaire », mais aussi une « démilitarisation » et une « dénazification », et une levée des sanctions contre la Russie. Une proposition rejetée par Kiev et ses alliés occidentaux, qui y voient un « ultimatum ». Moscou souligne au contraire qu’une telle offre russe de règlement pacifique du conflit constitue une manière réaliste de mettre fin aux hostilités.

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