En huit ans, les contrôles d’identité se sont multipliés en France, et cela, pour l’ensemble de la population (+81% chez les cadres, +148% chez les 55-64 ans, +79% chez les personnes perçues comme blanches).  Les hypothèses avancés dans le rapport imputent cette hausse aux Jeux olympiques en France en 2024, et plus largement aux mouvements sociaux qui ont massivement mobilisé le pays : la révolte des gilets jaunes, les manifestations contre la réforme des retraites ou encore la mort de Nahel, adolescent tué par un policier il y a deux ans de cela à Nanterre.

Autre analyse : un changement de politique interne à la police, avec l’adoption en 2017 de la loi sur la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, ou encore les nombreuses opérations contre le trafic de drogue, qui place le contrôle d’identité au cœur du dispositif de sécurité.   Les jeunes hommes perçus comme Noirs, Arabes ou Maghrébins ont quatre fois plus de risque d’être contrôlés et douze fois plus de risque de subir un contrôle « poussé », c’est-à-dire des fouilles, des palpations, des conduites au poste de police ou des injonctions à quitter les lieux.   

Certaines populations sont également plus exposées à une interaction avec les forces de sécurité qui est non conforme à la déontologie : tutoiement, provocations, insultes ou des gestes brutaux – dirigés en général vers les plus vulnérables. « On parle principalement de jeunes hommes perçus comme Noirs ou Arabes, de personnes qui se déclarent non-hétérosexuelles, souffrant d’un handicap, étant au chômage ou résidant dans des quartiers défavorisés », liste Claire Hédon, Défenseure des droits.

En 2023, la Cour des comptes estimait à 32 millions le nombre de contrôles d’identité effectués par les forces de sécurité. Or, d’après le rapport, le motif du contrôle n’est pas explicité pour plus d’une personne sur deux. « Il n’y a pas de traçabilité des contrôles d’identité, qu’elle soit individuelle ou collective, déplore Claire Hédon. La personne qui a été contrôlée n’a pas de preuve et donc de recours possible si elle se pense victime de discrimination. Même chose du côté des forces de sécurité : elles n’évaluent pas chaque année le nombre de contrôles d’identité et leur efficacité ». Elle préconise, à titre d’exemple, que les caméras-piétons soient déclenchées ou que le contrôle soit enregistré sur tablette.  

Faute de trace justement, seules 8 personnes sur 100 personnes confrontées à un comportement inadapté lors d’un contrôle de police tentent de faire reconnaître leur situation.   

Alors que la loi impose aux services de police de recevoir toute demande de dépôt de plainte, encore une personne sur cinq se voit refuser ce droit, d’après l’enquête de la Défenseure des droits. Un chiffre lié à la confiance accordée aux forces de sécurité. « C’est bien la vulnérabilité de certaines personnes qui fait que l’interaction avec les forces de l’ordre peut être plus difficiles et dans ces cas-là minent la confiance dans l’institution ».

Toujours selon le rapport, 59% des personnes ayant indiqué avoir vécu des discriminations lors d’une confrontation avec un agent se sentent inquiètes ou méfiantes en présence des forces de sécurité.

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