Deuxième semaine de combats meurtriers entre l’armée régulière et les paramilitaires au Soudan. Des volontaires mettent en place des opérations de sauvetage sous haute tension, négociant leur passage avec les soldats, exfiltrant des civils au milieu des bombardements. Certains affrètent des bus entiers pour l’Égypte ou vers d’autres villes du Soudan moins touchées par la guerre. Toutes ces organisations citoyennes vont prochainement être livrées à elles-mêmes. Alors que presque aucun service public ne fonctionne, la plupart des organisations humanitaires ont annoncé la suspension de leurs opérations.

Évacuer Khartoum, c’est aussi le mot d’ordre pour des centaines de ressortissants étrangers que les ambassades essayent de rapatrier au plus vite. Les deux belligérants se disent prêts à faciliter les évacuations d’étrangers, mais ces opérations s’annoncent délicates alors que les deux généraux ont prouvé à maintes reprises ne pas être en mesure de faire cesser les combats. Plus de 150 civils, de diverses nationalités, ont pu quitter le pays.

Tard dans la nuit de samedi à dimanche, des militaires français en provenance de Djibouti ont atterri sur le tarmac d’un aéroport militaire soudanais, au nord de Karthoum. L’ambassade de France a affrété, dimanche matin, plusieurs bus pour évacuer près de 200 ressortissants français et européens. Les Forces armées soudanaises qui assiègent la capitale, dans la banlieue, ont pris le relais des FDS jusqu’à cette base, au nord de Khartoum, où des avions gros-porteurs vont évacuer les ressortissants étrangers. Après le passage des convois, de nombreux rapports indiquent que les combats ont repris immédiatement dans plusieurs quartiers de Khartoum. Les hommes de Hemedti conservent le contrôle sur d’importants points stratégiques et notamment le palais présidentiel où leur chef a été filmé, dimanche matin. A chaque coin de rue, on voit des hommes en uniforme couleur sable, enturbannés, parfois très jeunes, se tenant à côté de blindés surmontés de canons anti-aériens. Partout, dans Khartoum, des échoppes saccagées, des bâtiments brûlés, des étals éparpillés.

Dimanche dans la nuit, les FSR ont affirmé dans un tweet avoir « coordonné » avec les États-Unis l’évacuation des diplomates américains et de leurs familles à bord de six avions. Une version en arabe du tweet des FSR a indiqué que l’évacuation a déjà eu lieu, une information confirmée par le gouvernement américain quelques heures plus tard.  « Aujourd’hui, sur mes ordres, l’armée américaine a mené une opération d’extraction du personnel gouvernemental américain », a affirmé le président Biden dans un communiqué, en appelant par ailleurs à l’arrêt des violences « insensées ». Selon le département d’État, un peu moins d’une centaine de personnes dont des diplomates étrangers, auraient pu être sortis du pays. Joe Biden a remercié Djibouti, l’Éthiopie, l’Arabie Saoudite pour leur aide déterminante. Il resterait encore plusieurs centaines d’Américains dans le pays. Leur évacuation n’est pas encore prévue.

L’Allemagne, quant à elle, est encore en train d’étudier la faisabilité d’une évacuation. Selon la presse allemande, les ministres de la Défense et des Affaires étrangères du pays ont tenu une réunion de crise samedi. L’Italie annonce faire de même.

Pour l’heure, les belligérants se montrent plutôt coopératifs. L’armée soudanaise s’est engagée à fournir son aide et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) se disent prêts à ouvrir tous les aéroports du Soudan pour évacuer les étrangers. Reste à savoir qui contrôle quel aéroport. Très difficile, à ce stade, d’avoir des informations fiables puisque les deux camps se livrent aussi à une bataille de communication.

Le Premier ministre britannique, Rishi Sunak a annoncé, dimanche, l’évacuation du Soudan du personnel diplomatique du Royaume-Uni et de leurs familles. « Les forces armées britanniques ont procédé à une évacuation complexe et rapide des diplomates britanniques et de leurs familles du Soudan, dans un contexte d’escalade de la violence et de menaces à l’encontre du personnel de l’ambassade », a-t-il tweeté. Au Royaume-Uni, le gouvernement assure par ailleurs faire « tout [son] possible », alors que des citoyens britanniques, piégés par les combats, se disent abandonnés par les autorités. Andrew Mitchell, ministre d’État en charge du Développement et de l’Afrique reconnait une « situation extrêmement préoccupante pour les ressortissants britanniques piégés par les combats ». Il assure que les autorités se « préparent actuellement à plusieurs éventualités ». En deux jours, Rishi Sunak a participé à trois réunions d’urgence. Les ministères de la Défense et des Affaires étrangères élaborent des plans pour évacuer leurs ressortissants par voie aérienne. Des centaines de Britanniques qui résident actuellement au Soudan, dont plusieurs milliers ont la double nationalité, et des dizaines d’employés de l’ambassade à Khartoum attendent des consignes,

Positionnées à la frontière, des troupes britanniques se tiennent prêtes à secourir les déplacés. La situation est préoccupante admet Downing Street, qui a lancé un appel d’urgence à ses citoyens : ils doivent tous s’enregistrer sur le site de l’ambassade. Certains racontent s’être cachés dans des sous-sols, avec des réserves de nourriture et d’eau, en attendant leur évacuation.

La première grande évacuation d’envergure a été menée samedi par l’Arabie saoudite. Elle concerne à la fois des Saoudiens et des ressortissants de 12 autres pays, notamment du Koweït, du Qatar, des Émirats, de l’Égypte, du Burkina Faso ou encore de l’Inde et du Pakistan. Les évacués ont été transportés dans un convoi de véhicules jusqu’à Port-Soudan. Puis ont traversé la mer Rouge à bord des navires saoudiens. Samedi, cinq bateaux sont arrivés à Jeddah, ville portuaire de l’Arabie saoudite. Au total, 91 citoyens saoudiens ainsi que 66 ressortissants de « pays frères » ont été évacués. « Des diplomates et des fonctionnaires internationaux », a précisé le ministère saoudien des Affaires étrangères.

D’autres pays préparent des évacuations avec des avions notamment prêts à partir depuis Djibouti. La Turquie a aussi annoncé une opération, dimanche, par voie terrestre.

Les combats ont fait rage aussi au Darfour, l’une des régions les plus pauvres du Soudan, où les FSR semblent bien implantés et la situation est catastrophique, selon un docteur de Médecins sans frontières (MSF), joint par l’AFP. Le but de cet appel est d’assurer la protection des civils, de protéger les centres de soins et le personnel de santé, permettre l’accès de l’aide humanitaire ou encore faciliter le transport des marchandises essentielles.

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