S’il ne faut s’attendre à aucun miracle du périple qu’entame le chef de la diplomatie américaine dans la région, force est de rappeler que depuis New York, l’Oncle Sam ferraille au niveau du   Conseil de sécurité de l’ONU pour arracher le maximum d’adhésions sur le projet de résolution soutenant la proposition de trêve à Gaza et appelant le Hamas à l’accepter, a annoncé la présidence sud-coréenne du Conseil. La dernière version du texte, vue par l’AFP, « salue » une proposition de trêve annoncée le 31 mai par le président américain Joe Biden, et appelle le Hamas « à également l’accepter et appelle les deux parties à appliquer pleinement ses termes sans délai et sans conditions ». Les Américains qui continuent à couvrir leur protégé israélien ne mentionnent pas Tel-Aviv comme partie intégrante au conflit alors qu’au regard du droit international, l’opération menée par le Hamas le 7 octobre entre, elle, dans le cadre de la lutte pour l’indépendance, ce que les Américains récusent en faisant figurer la résistance palestinienne dans la case du terrorisme.

Des observateurs avertis croient lire en l’empressement US à venir en aide à l’entité sioniste le prolongement d’un sinistre scenario visant à forcer le Hamas, par la multiplication des bains de sang dans l’enclave palestinienne, à s’incliner face au diktat israélo-américain. Même le synopsis du retrait de Benny Gantz, membre du cabinet de guerre israélien dirigé par le Premier ministre Benyamin Netanyahu, du gouvernement, après avoir lancé un ultimatum à son rival sur l’après-guerre à Gaza, ne dérogerait pas aux règles fixées pour ce sinistre scénario. Un gouvernement en crise serait incapable de prendre le parti d’une trêve prolongée dans la bande de Gaza, espace pour lequel l’ultra droite israélienne a d’autres desseins : la réoccupation !  Itmar Ben Gvir, ministre d’extrême droite, « exige » d’entrer au cabinet de guerre duquel il reste exclu.

Pour l’heure,  les Palestiniens de Gaza vivent au rythme des bains de sangs qui moissonnent les civils. Après celui de samedi qui a couté la vie à 274 et blessé 698 pour libérer 4 prisonniers dans le camp de Nousseirat, – 40 martyrs ont été recensés dans le raid sur l’école de l’UNRWA du camp, dont 14 enfants-, le ministère de la Santé de Gaza a annoncé 5 bains de sang qui ont fait, au cours des dernières 24 heures, 40 martyrs et 218 blessés. Plus, depuis le 7 octobre dernier, le bilan établi par les mêmes autorités de Gaza fait état, lundi, de 37.124 martyrs et 84.712 blessés. Les Palestiniens qui savent qu’ils ne peuvent compter que sur eux-mêmes pour faire valoir leur quête d’émancipation, n’auront certainement pas manqué de relever la symbolique des images renvoyées depuis la France, pays qui juge que le moment n’est pas opportun pour reconnaitre l’Etat de la Palestine, montrant Emmanuel Macron et Joe Biden trinquer au succès de l’opération commando menée dans le centre de Gaza par les troupes d’élite israéliennes, avec le soutien des Américains.

Les Brigades Al-Qassam se sont adressés aux israéliens par vidéo, leur annonçant que « l’armée israélienne a tué 3 de leurs prisonniers dans le camp de Nousseirat, en échange de la récupération des quatre prisonniers samedi, au même endroit ». Les Brigades Al-Qassam ont révélé que « l’un des trois prisonniers décédés détenait la nationalité américaine ». La vidéo montre des images du bombardement violent et brutal lancé par l’occupation sur le camp de Nousseirat, où les forces d’occupation israéliennes ont commis un horrible massacre entraînant le martyre de centaines de personnes. La vidéo a montré certaines blessures de civils palestiniens suite au massacre, notamment des enfants. Al-Qassam a également publié les images des trois prisonniers qui ont été tués par l’armée d’occupation lors du massacre de Nousseirat. La vidéo s’achève sur un message adressé aux Israéliens colons, disant :  «  Vos prisonniers ne seront pas libérés tant que nos prisonniers ne seront pas libérés », les avertissant que « le temps court en défaveur des prisonniers israéliens ».

A rappeler que lors de l’assaut israélien, un officier de l’unité Yamam, unité des missions spéciales des Gardes-frontières de la police, a été tué lors ded affrontements à Nousseirat. Commentant la récupération des prisonniers et indiquant que l’opération n’entraînera pas de changements stratégiques au cours de la guerre, Eitan Ben Eliyahu, ancien commandant de l’armée de l’air de l’armée d’occupation, a estimé  « que cette opération ne peut forcer le Hamas à se rendre ». Tamir Hamin, ex-chef de la Division du renseignement militaire israélien, a affirmé de son côté que la récupération des quatre prisonniers était un « événement tactique », soulignant que « la situation stratégique dans laquelle se trouve Israël n’a pas changé ».

Sur les réseaux sociaux, des internautes ont constaté la grande différence entre l’état de santé des détenus israéliens après leur libération et celle des détenus Palestiniens. Lama Tatour, présentatrice de la chaine de télévision israélienne Channel 12 qui fait partie des Palestiniens autochtones, appelés en Israël les Arabes de 48, n’a pas pu s’empêcher de faire la remarque. Cette présentatrice de l’émission « Point de vue » (Manzour) en langue arabe a écrit sur Instagram : « C’est la tête d’une femme qui a été kidnappée depuis 9 mois ? Ses sourcils sont plus rangés que les miens. Et sa peau, ses cheveux et ses ongles ? que s’est-il passé ? » Et de conclure : « Et c’est pour elle que devraient mourir et être déchiquetés des enfants et des femmes innocentes ? ». Elle a été démise de son poste, après avoir été violemment fustigée sur les réseaux sociaux.

Pendant que les agences et les médias internationaux décrivaient les scènes de liesse parmi la population israélienne, des explosions de joie, des larmes de joie, des cris de joie… Faisant passer les sentiments des uns, les réactions des autres, aucune ne s’est penchée sur les scènes de détresse parmi la population martyrisée du camp de Nousseirat.

La vue des images des victimes palestiniennes, n’a pas manqué d’horrifier le chef de l’ONU. « Le camp de réfugiés de Nousseirat est devenu l’épicentre du choc sismique dont souffrent encore les civils de Gaza », a déclaré Martin Griffith dans un post sur X. « Cette souffrance collective doit cesser, et maintenant » a-t-il exigé, sans espoir que ses paroles aient le moindre impact sur les dirigeants israéliens. Ces derniers avaient dénigré la sommation de la Cour Internationale de Justice au Premier ministre israélien d’arrêter l’offensive contre Rafah. De même pour les mandats d’arrêt de la Cour pénale internationale. Depuis 1967, les dirigeants israéliens de tous bords avaient tourné le dos aux 131 résolutions onusiennes. A charge pour Washington de lisser, via son véto, celles qui risquaient d’être contraignantes.

Francesca Albanese, rapporteuse spéciale des Nations unies sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens, a souligné de son côté qu’ « Israël aurait pu libérer tous les otages, vivants et intacts, il y a huit mois, lorsque le premier cessez-le-feu et l’échange d’otages ont été mis sur la table. Pourtant, Israël a refusé afin de continuer à détruire Gaza et les Palestiniens en tant que peuple ». Selon elle, cette opération de sauvetage des otages avait une « intention génocidaire qui s’est transformée en action. C’est clair comme de l’eau de roche ».

F. Albanese a plusieurs fois accusé Israël d’être responsable de la mort de Palestiniens et a même présenté un rapport l’accusant de « génocide ».

L’élimination du peuple palestinien a toujours fait partie des objectifs israéliens. Ceci avait commencé par le slogan idéologique du mouvement sioniste : « une terre sans peuple pour un peuple sans terre ». Il s’est poursuivi par les éliminations physiques, réalisées via les massacres et l’exode qui ont accompagné leur expropriation de leurs terres, à la fin des années 40.

Sans oublier la répression sanguinaire des deux intifada, de la deuxième surtout pendant laquelle a été perpétré le massacre du camp de Jénine. Ni le renfermement du peuple palestinien dans la bande de Gaza et la Cisjordanie, des camps à ciel ouvert, l’un assiégé, l’autre découpé en bantoustans soumettant ses habitants à des incursions souvent sanguinaires, des campagnes d’arrestations et des destructions des maisons sans répit. Les 6 guerres lancées contre la bande de Gaza en 2008-2009, 2012, 2014, 2019,2021 et 2022, outre celle qui a toujours cours, ne fera pas fléchir les Palestiniens. La preuve se situe sur le terrain où les combattants des diverses factions palestiniennes tiennent la dragée haute aux contingents israéliens dans l’enclave palestinienne. Mais aussi en Cisjordanie où les modus operandi changent avec plus de victimes parmi l’occupant israélien.

Selon un rapport conjoint de l’Observatoire euro-méditerranéen des droits de l’homme, du New York Times et de l’Université de Hambourg, le nombre de bombes d’occupation israéliennes larguées sur la bande de Gaza dépasse de loin celui de la Seconde Guerre mondiale. Le rapport explique que plus de 70 000 tonnes de bombes y ont été larguées depuis octobre dernier. Le rapport indique que les quantités d’explosifs larguées (en tonnes) sont estimées  à 18.300 sur Londres (1940-1941), 8.500 sur Hambourg (1943) et 3.900 sur Dresde (1945).

En accueillant « les 4 otages », une sexagénaire israélienne a confié à l’AFP avoir des « sentiments mitigés » en évoquant les victimes palestiniennes.  Les médias ont rapporté qu’un soldat israélien s’est suicidé après avoir reçu l’ordre de revenir au service militaire. Il n’est pas le premier.

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