C’est dans ce contexte tendu que s’est tenue dimanche une manifestation à Tunis. La manifestation prévue de longue date était organisée par le Front du salut national qui regroupe des personnalités de diverses obédiences politiques opposées à K. Saïed. Initialement, elle devait exiger la définition d’une date pour la prochaine présidentielle alors que le mandat de K. Saïed doit prendre fin en octobre. Les manifestants demandent un calendrier électoral et la fin du « coup d’Etat » dans lequel le pays est, assurent-ils, englué.
Mais le rassemblement a pris une tournure différente au vu des derniers événements, notamment l’arrestation de l’avocate S. Dahmani. Réunis au siège de leur ordre, à la Maison des avocats samedi soir, les avocats n’ont rien pu faire pour empêcher ces hommes d’emmener leur consœur avec eux. La scène s’est déroulée sous leurs yeux. Ils se sont aussitôt réunis pour exprimer leur solidarité avec l’avocate et partager leurs inquiétudes alors que les arrestations et détentions provisoires se multiplient en Tunisie. Pour eux, elle a fait l’objet d’un kidnapping.
S. Dahmani, tous la connaissent, elle et sa dérision quand il s’agit de critiquer le pouvoir actuel auquel elle s’oppose fréquemment sur les plateaux TV et radio mais personne n’aurait pu imaginer qu’elle soit arrêtée de cette façon. « C’est un kidnapping – oui, Je considère que ce qui s’est passé est un kidnapping de Sonia Dahmani ! A cette heure-ci, d’ailleurs, nous ne savons pas où elle a été emmenée. D’autres avocats ont été molestés et une des avocates a été blessée et transférée à l’hôpital», lance un avocat à ses confrères. « … C’est la première fois, dans l’histoire des avocats tunisiens, que l’on entre de cette façon dans la Maison des avocats. C’est du jamais vu ! Ce soir, ça a été l’ordre des avocats mais demain ça peut être n’importe quelle autre représentation professionnelle. On ne peut pas se taire !» poursuit l’avocat.
Face à la brutalité de la méthode et désormais inquiets pour leur propre liberté, les avocats tunisiens ont annoncé se mettre en grève à partir de lundi.
Samedi soir, il y a aussi eu deux autres arrestations de figures médiatiques : Mourad Zeghidi et Borhen Bssaïes qui ont été eux aussi interrogés par la police et placés en détention provisoire.