Dans l’une des vidéos, des hommes armés demandent à une femme voilée accusée de « prostitution » de s’agenouiller dans une rue avant de l’abattre, alors qu’un homme qui semble être l’actuel ministre de la Justice filme la scène avec son téléphone. Dans une autre vidéo, on voit le même homme énoncer une condamnation à mort contre une femme pour « prostitution », et un combattant à ses côtés lui tirer une balle dans la tête.

Rami Abdel Rahmane, directeur de l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), a affirmé mercredi à l’AFP que les vidéos dataient de 2015, en pleine guerre civile, et qu’il s’agissait bien de C. al-Waissi, qui était alors juge religieux au sein du Front al-Nosra, avant sa séparation d’Al-Qaïda.

Samedi, la plateforme de vérification en ligne Verify Syria a cité un « haut responsable » des nouvelles autorités selon lequel C. al-Waissi était un juge dans la région rebelle d’Idleb (nord-ouest), contrôlée par HTS à l’époque. Le responsable a ajouté que ces exécutions avaient été « menées conformément aux lois en vigueur à l’époque » et reflétaient « une période révolue ».

Interrogé par l’AFP, un responsable du ministère de la Justice n’a pas souhaité faire de commentaire. Alors que des groupes de défense des droits humains ont fait part à l’agence française de leur profonde inquiétude.

L’implication apparente de C. al-Waissi dans des exécutions « soulève des questions complexes de responsabilité et de justice », a déclaré Hiba Zayadin de l’ONG Human Rights Watch. Elle a dénoncé des « exécutions extrajudiciaires au regard des normes internationales relatives aux droits humains » et appelé à « une enquête indépendante et transparente ».

Mohammad al-Abdallah, du Centre syrien pour la justice et la responsabilité (SJAC), a réclamé le limogeage du ministre, qualifiant de « scandaleuse » sa nomination à la tête de la Justice. « Cela envoie le pire message à tout le monde en Syrie et à l’étranger », a-t-il ajouté.

Les nouveaux dirigeants syriens sont soumis à une intense pression internationale pour mener une transition inclusive qui respecte les droits des minorités et des femmes. « Ce qui est demandé aujourd’hui est de limoger le ministre de la Justice Chadi al-Waissi, car il constitue un désastre pour l’avenir de la Syrie », a écrit sur Facebook Rowaida Youssef Kanaan, militante des droits humains,.

HTC, ex-branche syrienne d’Al-Qaïda, affirme avoir rompu avec le jihadisme mais reste classé « terroriste » par plusieurs capitales occidentales.

A New-York, Geir Pederson, émissaire du secrétaire général pour la Syrie, a appelé, mercredi, la communauté internationale à s’assurer que la prochaine phase « réussisse ». Il voit d’un bon œil l’échéancier avancé par le nouvel homme fort de la Syrie, avec des élections sous quatre ans, et d’ici là, l’organisation d’un dialogue national inclusif. Pour préparer cette conférence de dialogue national, les autorités prévoient une commission reflétant les différentes composantes de la société. Saluant l’annonce de cette commission élargie, G.Pedersen a souligné l’importance que le processus ne soit pas « bâclé ». « Il existe d’immenses opportunités pour construire de nouvelles fondations pour la paix durable et la stabilité en Syrie. Mais des erreurs ou des occasions manquées pourraient menacer l’avenir de la Syrie et planter les graines de l’instabilité », a déclaré le messi dominici lors d’une réunion du Conseil de sécurité des Nations unies.

Il a insisté sur le fait qu’ « une transition politique inclusive est le moyen le plus efficace pour inspirer confiance », appelant les autorités à « tendre la main » à toutes les communautés. « D’importantes zones ne sont pas sous le contrôle des autorités de transition, le conflit continue, et il existe également de véritables menaces à la souveraineté, l’unité et l’intégrité territoriale de la Syrie », a souligné l’émissaire de l’ONU.

Parmi les erreurs figurent l’invasion du Golan par Israël et et la violation de la souveraineté territoriale syrienne. Les représentants de l’ONU, mais aussi la grande majorité des 15 membres, ont critiqué l’avancée de l’armée israélienne. De la même façon, la levée des sanctions qui avaient été imposées au régime de a été réclamée non seulement par G.Pederson, mais aussi par une délégation importante de pays arabes.

Ultimatum turc

Alors que les combats font rage dans le nord syrien entre faction pro turque et faction kurde, on dénombre trente-sept morts dans la journée de jeudi, Hakan Fidan, ministre turc des Affaires étrangères, a révélé que son pays a adressé à l’organisation PKK/YPG un ultimatum et que si elle n’y répondait pas, les mesures nécessaires seraient prises.

« Les mesures nécessaires sont des mesures militaires. L’ultimatum que nous leur avons donné (au PKK/YPG) est évident. Nous l’avons lancé par l’intermédiaire des États-Unis et de la presse. Ceux qui sont des combattants terroristes internationaux, venus de Turquie, d’Iran et d’Irak, doivent immédiatement partir », a précisé le chef de la diplomatie turque lors d’une interview avec CNN Turk.

La Turquie considère la milice des Forces démocratiques syriennes (FDS) comme étant une émanation du PKK/YPG qui est listé parmi les organisations terroristes par Ankara.

Évoquant le rôle des Etats-Unis en Syrie, le responsable turc a estimé « qu’aujourd’hui, 85 % des raisons qu’ils avançaient pour maintenir leur présence en Syrie, en particulier sous l’administration du président américain Joe Biden, sont caduques ». « Ils invoquaient la présence iranienne et russe pour justifier leur présence. Aujourd’hui, c’est la question de Daech qui se pose. Ils soulèvent maintenant la question de la lutte contre Daech », a-t-il dit.

Selon le ministre turc « le PKK assure des services pénitentiaires aux États-Unis dans la lutte contre Daech », il a affirmé que le nouveau gouvernement syrien était prêt à assumer le contrôle des combattants de Daech, avec le concours de pays et acteurs, y compris la Turquie. La lutte contre Daech ne saurait être utilisée « comme excuse pour protéger » le PKK/YPG, a-t-il noté.

Côté américain, Anthony Blinken, secrétaire d’Etat américain a déclaré que les Etats-Unis travaillent « très dur » pour répondre aux « inquiétudes légitimes » de la Turquie pour sa sécurité et empêcher une offensive d’Ankara contre les combattants kurdes de Syrie. « Ce qui n’est absolument pas dans l’intérêt (de la Syrie) serait un conflit, et nous travaillons très dur pour nous assurer que cela ne se produise pas », a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse avec son homologue français Jean-Noël Barrot à Paris.

« Les Kurdes de Syrie ont été pour les États-Unis et pour la France des alliés fidèles, des alliés résolus dans la lutte contre le terrorisme islamiste » de Daech (groupe Etat islamique), a pour sa part rappelé J-N. Barrot, qui a salué les efforts d’A.. Blinken. « Des dizaines de milliers de combattants terroristes sont aujourd’hui dans des prisons, gardés par des Kurdes du Nord-Est syrien », a observé le ministre français, pour qui la Turquie aspire « légitimement » à des « garanties de sécurité », tout comme les Kurdes.

Or, selon l’OSDH, les forces américaines continuent de renforcer leur présence et leurs bases en Syrie où ils disposent d’une douzaine de base où sont déployés 2000 militaires. Selon cette ONG basée au Royaume-Uni, un avion-cargo américain transportant des armes et des équipements militaires a atterri mercredi dans la base Kharab al-Jir dans la province de Ramilane au nord de Hassaké. La même source dit avoir dénombré depuis le début de l’année, l’atterrissage de 10 avions américains sur les bases de la « Coalition internationale » en Syrie, et l’arrivée de 160 camions et véhicules fermés transportant du matériel logistique et militaire, dont certains ont été transportés à Ain al-Arab (Kobané).

Le correspondant de la chaine de télévision libanaise al-Mayadeen a rendu compte de bombardements perpétrés mercredi par l’armée turque contre les cibles des Forces démocratiques syriennes (FDS). Il a rapporté qu’un drone turc a bombardé une voiture des FDS dans la province de Aïn Arab (Kobané) dans la province est d’Alep, un autre drone a pilonné un lance-roquettes dans la province de Manbij, et l’artillerie turque et la milice pro turque de l’Armée nationale syrienne ont pilonné le pont Qarqozaq au sud de Ain al-Arab. Le centre médiatique des FDS a pour sa part, indiqué que des avions militaires turcs ont menée des raids aériens contre le barrage de Tichrine et son entourage, en même temps d’assauts lancés par l’ANS contre les villages au nord du barrage et au sud-est de Manbij ou les combat battent leur plein. Le centre a mis en garde contre l’effondrement du barrage dont la responsabilité en incomberait à l’Etat turc. Il a aussi indiqué que le conseil militaire de Manbij a détruit deux voitures équipées de mitrailleuses Doshka de mercenaires pro turcs au nord du barrage de Tichrine.

Le centre avait révélé mardi que les drones turcs avaient bombardé un convoi d’habitants du Nord et de l’Est syrien qui se dirigeaient vers le barrage réclamant de faire cesser les attaques turques contre ce barrage qui alimente leurs régions en eau et en électricité. Des martyrs et des blessés ont été déplorés dans ces raids, selon le centre médiatique des FDS.

L’OSDH a rendu compte de 24 martyrs et blessés dans les raids turcs sur la province d’Alep, dont 16 sur le convoi en question qui comptait des milliers de voitures d’après lui.

Le chef des FDS a déclaré mercredi s’être mis d’accord avec le nouveau pouvoir pour rejeter toute « division » territoriale de la Syrie. « Nous sommes d’accord sur l’importance de l’unité et de l’intégrité territoriale de la Syrie, et nous rejetons tout projet de division qui menacerait l’unité du pays », a déclaré Mazloum Abdi, dans une déclaration transmise à l’AFP commentant une rencontre en décembre entre ses forces et les autorités islamistes qui ont renversé Bachar al-Assad à Damas.

Comments are closed.

Exit mobile version