En vertu du système confessionnel de partage du pouvoir, la présidence du Liban est réservée à un chrétien maronite alors que le Premier ministre est un musulman sunnite et le président du Parlement un musulman chiite. Dans un pays secoué par une guerre civile de 1975 à 1990, la classe dirigeante arrivait habituellement à se mettre d’accord sur un nom, mais elle a échoué à parvenir à un consensus depuis la fin du mandat du dernier président, Michel Aoun, en octobre 2022.

Plusieurs pays étrangers comme les Etats-Unis, l’Arabie saoudite ou la France font depuis pression pour imposer le nom d’un président. Si Amos Hochstein a séjourné à Beyrouth où il a mis en évidence la carte de l’actuel chef de l’armée libanaise, Riyad tablant aussi sur la même carte, tel ne semble être le cas de Paris qui a envoyé Yves Le Drian à Beyrouth à l’avant-veille de la séance parlementaire jugée décisive pour la présidentielle.

« Le candidat préféré est le commandant en chef de l’armée libanaise, Joseph Aoun, qui semble être soutenu par les Etats-Unis et, dans une moindre mesure, par la France et l’Arabie saoudite », estime l’analyste libanais Karim Bitar. Tandis que le Qatar opte pour Elias Baissari, chef de la sécurité par intérim. Si lui ou tout autre candidat échoue à obtenir un tel score, le Parlement doit tenir un second tour, où une majorité simple de 65 voix suffit pour l’emporter. La Constitution stipule que les candidats à la présidence ne doivent pas avoir occupé de hautes fonctions publiques au cours des deux dernières années, ce qui disqualifierait techniquement J. Aoun.

Le Hezbollah, allié du Mouvement Amal que préside Nabih Berri, chef de l’instance parlementaire et négociateur en chef de l’accord avec Israël parrainé par les USA, a son mot à dire dans les tractations en cours. D’après des analystes, « il peut toujours s’opposer à quelqu’un dont il se méfie vraiment ».

L’envoyé spécial américain a exhorté lundi la classe dirigeante à parvenir à un « consensus politique » pour élire Joseph Aoun, chef de l’armée libanaise. Mais des courants chrétiens ont opposé leur véto à cette candidature, position que les factions de la résistance ne sauraient qu’adouber au regard de la concorde entre ces parties.  J. Aoun doit encore « surmonter de sérieux obstacles » pour être élu, notamment le manque de soutien des principaux partis chrétiens : Le Courant patriotique libanais (CPL) et les Forces Libanaise (FL). Le chef de l’armée aurait besoin d’une majorité des deux tiers, au moins 86 des 128 députés, pour être élu président.

A 20 jours de l’expiration du délai de cessez-le-feu et du retrait israélien du Liban-Sud prévu à cette échéance, Nagib Mikati, Premier ministre sortant, a rappelé qu’il s’était entretenu le 6 janvier avec A. Hochstein qui avait présidé la réunion du comité chargé de surveiller le respect de la trêve. « Il m’a assuré que dans les trois semaines à venir, Israël se retirera complètement de toutes les régions qu’il avait investies » au Liban-Sud, a affirmé le responsable libanais. Il a ensuite reconnu que le retrait israélien « a pris du temps » mais qu’il s’est « accéléré » la semaine dernière. « Israël s’est retiré d’un tiers des terres où il s’était infiltré, soit tout le secteur ouest » du Liban-Sud, a-t-il détaillé. Il a de nouveau insisté sur l’application pleine et entière de la résolution 1701 du Conseil de sécurité de l’ONU, et le fait « d’obliger l’ennemi israélien à l’appliquer immédiatement (…) sans manœuvres et sans inventer des excuses pour s’y soustraire » selon ses mots. Cette résolution avait mis fin à la guerre de 2006 entre Israël et le Hezbollah.

Cette déclaration du Premier ministre libanais coïncide avec le déploiement de l’armée libanaise dans la ville limitrophe de Naqoura. « Le village est presque entièrement détruit », a déploré Abbas Awada, président du conseil municipal, dans des propos repris par l’Agence nationale d’information (Ani, officielle). Il a appelé les habitants « à reporter leur retour au village en attendant que soit terminée l’inspection de l’armée sur le terrain, de peur d’éventuelles munitions non explosées ». Dans un post sur X publié mardi après-midi, l’armée libanaise a écrit que ses unités « ont commencé à se déployer à Ras Naqoura, Alma el-Chaab, Tayr Harfa (caza de Tyr) et Beit Lif (caza de Bint Jbeil), ainsi que dans d’autres localités» du Liban-Sud, dans les secteurs ouest et central de la région, «après le retrait israélien » de ces positions. La troupe « poursuit son ratissage technique afin de désamorcer et enlever les munitions non explosées, ouvrir les routes et retirer les décombres, en concertation avec la Finul et le comité de surveillance du cessez-le-feu », poursuit le texte. L’armée somme enfin les citoyens « de ne pas s’approcher de la région et de respecter les directives des unités de l’armée jusqu’à ce que le déploiement soit achevé ».

Un communiqué publié par la Direction de l’orientation du commandement de l’armée libanaise a indiqué que « l’armée achève son déploiement à Naqoura et que les unités spécialisées poursuivent les études techniques visant à retirer les munitions non explosées, à ouvrir les routes et à enlever les décombres en coordination avec la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL) et le comité quinquennal chargé de superviser l’accord de cessez-le-feu. » Selon le communiqué, les mouvements de l’armée libanaise coïncident avec une tournée dans la région du chef du comité, le général américain, et de ses deux membres, le général français et le commandant du secteur du Litani Sud de l’armée.

L’armée d’occupation israélienne s’est retirée du secteur ouest du sud-Liban en préparation du déploiement de l’armée libanaise dans la région. Selon la chaîne israélienne Kan, il s’agit du « premier retrait majeur de l’armée israélienne depuis la signature de l’accord avec le gouvernement libanais ».

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