Le débat sur le projet de loi organique n° 97.15, définissant les conditions et modalités d’exercice du droit de grève, continue de diviser les acteurs socio-économiques. La Confédération Marocaine des TPE-PME s’oppose fermement à ce texte, qu’elle considère inadapté aux réalités des petites entreprises et des auto-entrepreneurs. Ce projet, élaboré en concertation avec le Patronat et les syndicats, ne prend pas en compte, selon elle, les préoccupations de la majorité des entreprises marocaines.

La Confédération critique l’absence de consultations avec les TPE-PME lors de l’élaboration du texte, soulignant que seuls la Confédération patronal (CGEM) et les syndicats ont été impliqués. Ce choix marginalise les petites structures, malgré leur importance dans l’économie marocaine : elles constituent 98 % des entreprises et emploient plus de 75 % de la main-d’œuvre nationale, rappelle-t-on.

Le projet de loi actuel, selon la Confédération, favorise les grandes entreprises et les syndicats sans tenir compte des spécificités des TPE-PME. Ces dernières sont particulièrement vulnérables aux grèves, qui peuvent paralyser leurs activités et menacer leur survie en raison de leurs ressources limitées.

La Confédération formule plusieurs griefs à l’égard du projet de loi, notamment le manque de garanties pour protéger les petites entreprises face aux perturbations économiques causées par les conflits sociaux. Elle insiste sur la nécessité d’un cadre législatif équilibré, prenant en compte les défis des TPE-PME tout en préservant les droits des travailleurs. En outre, elle déplore l’absence de représentativité des TPE-PME et des auto-entrepreneurs au sein des instances parlementaires, du dialogue social et des conseils d’administration des institutions publiques telles que la CNSS, la DGI ou encore Maroc PME. Cette exclusion prive les petites entreprises de moyens efficaces pour défendre leurs intérêts face aux grandes structures.

Insistant sur le fait que seules des mesures adaptées permettront d’assurer un équilibre entre les droits des travailleurs et la viabilité des petites entreprises, la Confédération lance ainsi un appel au le gouvernement pour promouvoir un dialogue inclusif, intégrant les TPE-PME dans les consultations sur les réformes législatives. Elle exhorte aussi les parlementaires à considérer les besoins de l’ensemble du tissu économique marocain lors du vote sur ce projet de loi. Selon elle, il est impératif que les législations économiques ne favorisent pas une minorité d’entreprises au détriment de la majorité, composée des TPE-PME et des auto-entrepreneurs.

A rappeler que le groupe parlementaire de la Confédération Générale des Entreprises du Maroc (CGEM) à la Chambre des Conseillers a exprimé une vive inquiétude face à ce qu’il perçoit comme une dérive dans l’exercice du droit de grève par certains travailleurs. Selon le groupe, cette pratique viserait à « faire pression ou extorquer » les employeurs, et ce, en dépit du respect par ces derniers des droits des salariés. Tout en reconnaissant le caractère constitutionnel du droit de grève, le groupe a insisté sur l’impératif de l’exercer dans le cadre des lois en vigueur, sans mettre en péril la viabilité des entreprises qui jouent un rôle vital dans l’économie nationale et la création d’emplois.

En réponse, Younes Sekkouri, ministre de l’Inclusion économique, de la Petite Entreprise, de l’Emploi et des Compétences, a insisté sur l’importance d’une équité stricte dans la mise en œuvre du projet de loi organique sur le droit de grève. Il a estimé que l’appel à la grève doit être exclusivement encadré par des syndicats. En l’absence de ces derniers, une alternative pourrait être envisagée, comme le regroupement de travailleurs, avec une amélioration progressive de cette méthode a-t-il suggéré. Comme il a rappelé que la grève doit être conçue comme un outil de résolution des conflits et non comme une source de problèmes. Pour cela, les syndicats doivent disposer de capacités de négociation réelles, ce qui implique que leurs membres respectent les décisions prises, notamment celles relatives à la reprise du travail. Il a ajouté qu’un syndicat sérieux et responsable comprend l’importance de la durabilité des entreprises pour préserver les emplois des travailleurs qu’il représente.

Le ministre a également souligné la nécessité pour les employeurs de s’engager avec sérieux dans leurs relations avec les syndicats. « Lorsque nous donnons des droits aux syndicats, les employeurs bénéficient d’une collaboration avec des syndicats forts et responsables », a-t-il déclaré.

Enfin, Y. Sekkouri a mis en garde contre les conséquences d’un affaiblissement des syndicats, qui pourrait conduire à des formes de protestation non encadrées et irresponsables, au détriment des employeurs. « Un cadre juridique clair, définissant les responsabilités et obligations de chaque partie, est essentiel pour protéger les droits de tous et instaurer un équilibre entre les intérêts des employés et des employeurs », a-t-il conclu.

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