Alors que l’Assemblée générale des Nations unies se tient actuellement à New York, la confédération de lutte contre la pauvreté a publié un rapport soulignant la nécessité de réformer immédiatement l’ONU et ses organes, en particulier le Conseil de sécurité.
« Oxfam est extrêmement clair : on ne peut pas continuer avec ce Conseil de sécurité colonial et archaïque. Nous devons réorganiser le Conseil de sécurité. Nous devons nous assurer que le Conseil de sécurité soit inclusif, égalitaire, efficace et réactif », a déclaré à Anadolu le directeur exécutif d’Oxfam International, A. Behar. Selon lui, les cinq États membres permanents – les États-Unis, le Royaume-Uni, la France, la Chine et la Russie – ont assumé la responsabilité de la sécurité mondiale dans ce qui est aujourd’hui « une ère coloniale révolue ».
« Nous avons besoin d’une nouvelle vision pour un système des Nations unies qui réponde à ses ambitions initiales et qui soit adapté à la réalité d’aujourd’hui. Un conseil qui travaille pour la majorité mondiale et non pour une poignée de puissants. Cela commence par le renoncement au droit de veto et au privilège de porter la plume des cinq membres permanents (P5) et par l’élargissement de la composition du Conseil à d’autres pays », a déclaré A. Behar. Selon lui, le Conseil de sécurité a manqué à ses devoirs envers des millions de personnes, car quelques nations puissantes ont « abusé de leur droit de veto » et d’autres privilèges pour servir leurs propres intérêts.
« La conclusion à tirer est que le Conseil de sécurité n’est pas adapté à son objectif et que l’architecture mondiale en matière de sécurité et de paix est en ruine », a-t-il déclaré. Et d’ajouter : « Elle est paralysée, elle est dysfonctionnelle, elle est inefficace, et cela se produit essentiellement en raison du caractère colonial persistant et de l’inégalité au sein du Conseil de sécurité ».
Le rapport d’Oxfam souligne « à quel point le Conseil de sécurité n’a pas été en mesure de jouer le rôle qui lui était dévolu, celui d’un instrument de paix et de sécurité », a-t-il ajouté.
« Ce que nous demandons également, c’est qu’il est essentiel de démocratiser le pouvoir de porter la plume au sein du Conseil de sécurité. On ne peut pas continuer à laisser aux P5, qui détiennent également le bouton nucléaire, tout le pouvoir de rédaction et de soumission des résolutions », a-t-il ajouté.
Soulignant l’urgence d’un cessez-le-feu à Gaza et de la fin de l’impunité d’Israël, A. Behar a déclaré que les États-Unis avaient usé de leur droit de veto essentiellement pour défendre « les intérêts d’Israël ».
Selon Oxfam, au cours de la dernière décennie, l’Assemblée générale des Nations unies a adopté au moins 77 résolutions en faveur de l’autodétermination des Palestiniens, des droits de l’homme et de la fin de l’occupation illégale par Israël, mais les États-Unis ont utilisé leur droit de veto pour protéger leur allié, Israël.
Les vetos américains ont créé « un environnement complaisant permettant à Israël d’étendre ses colonies illégales dans les territoires palestiniens en toute impunité », a déclaré A. Behar. « Le plus souvent, les vetos des membres permanents du Conseil de sécurité sont allés à l’encontre de la volonté de l’Assemblée générale des Nations unies, au sein de laquelle tous les États sont représentés », a-t-il ajouté.
Selon le rapport d’Oxfam, la France et le Royaume-Uni n’ont pas usé de leur droit de veto au cours de la dernière décennie, mais avec les États-Unis, ils « ont porté la plume sur les deux tiers des résolutions » relatives à 23 crises prolongées dans le monde. « Le Royaume-Uni a porté la plume sur le Yémen, par exemple, où il a un héritage colonial et des intérêts stratégiques pour préserver les voies maritimes. En 2023, le Mali s’est opposé à ce que la France porte la plume en raison de ce qu’il considère comme des ‘actes d’agression et de déstabilisation’ dans ce pays », peut-on lire dans le rapport.
Le rapport note que de nombreuses autres initiatives ne sont même pas rédigées ou soumises parce qu’elles feraient inévitablement l’objet d’un veto.
Selon le rapport, plus d’un million de personnes ont été tuées dans ces 23 crises et plus de 230 millions de personnes ont un besoin urgent d’aide, soit une augmentation de plus de 150 % depuis 2015. « Le comportement erratique et autocentré des membres du Conseil de sécurité de l’ONU a contribué à l’explosion des besoins humanitaires, qui dépassent désormais la capacité des organisations humanitaires à y répondre », a déclaré A. Behar. Et le directeur exécutif d’Oxfam International de conclure : « Cela exige un changement fondamental de notre architecture de sécurité internationale au plus haut niveau. »