Le président ukrainien a demandé au président français d’attendre pendant une conférence de presse lorsque ce dernier l’a appelé au téléphone le 19 mars. « Excuse-moi, Emmanuel, je suis en train de parler avec un journaliste. Je te rappelle dans quelques minutes, disons, 15-20 minutes ? Merci, ça marche. Salut » – a déclaré en anglais Volodymyr Zelensky à Emmanuel Macron avant de raccrocher.
Quand V. Zelensky a raccroché, il a confirmé aux journalistes qu’il venait de parler avec E. Macron, et qu’ils parlaient souvent, « une fois par jour en moyenne ». Le président ukrainien a expliqué que Kiev et Paris avaient des relations étroites, et que son collègue français « l’aidait beaucoup ». Il a aussi annoncé sa prochaine visite en France la semaine prochaine sans préciser de date exacte. Le Kremlin est sceptique quant à la sincérité de la France dans le processus de paix en Ukraine et voit dans ses actions la volonté de « poursuivre la guerre par tous les moyens ». « L’Europe s’est donc mise à s’armer frénétiquement et elle se serait plutôt transformée en parti de la guerre », a précisé Dmitri Peskov, porte-parole du Kremlin.
Jeudi, les pays occidentaux se réunissent à Bruxelles pour discuter encore une fois du dossier ukrainien et de la défense européenne. Les mêmes sujets sont au menu de la rencontre des chefs militaires d’une trentaine de pays à Londres.
La volonté du président de continuer à fournir une aide militaire à l’Ukraine pourrait le mettre sur une voie de collision avec son homologue américain, a suggéré Bloomberg. Après une conversation téléphonique entre les présidents russe et américain le 18 mars pour discuter d’un règlement pacifique du conflit en Ukraine, le dirigeant français a déclaré que Paris continuerait à soutenir Kiev. Au cours de la conversation, Vladimir Poutine a fait de l’arrêt des livraisons d’armes et de renseignements à l’Ukraine l’une des conditions d’un cessez-le-feu, ce que, selon Bloomberg, les pays européens « n’accepteront en aucune circonstance ».
Sophie Primas, porte-parole du gouvernement français, a déclaré que ces conditions sont « irréalistes » pour Paris. L’agence de presse souligne également que le président français a déjà rencontré les ministres de la Défense de plus de 30 pays, dont les principales puissances militaires européennes, alors que Donald Trump insiste sur une fin rapide du conflit.
Avec Keir Starmer, Premier ministre britannique, E. Macron entend réunir les représentants de 37 pays pour discuter de la poursuite du soutien militaire et financier à Kiev, ainsi que de la livraison de divers équipements militaires, après l’instauration d’un cessez-le-feu en Ukraine. Bloomberg estime que l’initiative du président français « prend de l’ampleur » sur la base des récentes réunions sur ce sujet, bien qu’il y ait toujours des opposants à ces idées. L’agence de presse considère toutefois que la relation de longue date entre D. Trump et E’ Macron joue un « rôle important » dans ce contexte.
Le 18 mars, V. Poutine et D. Trump ont eu une conversation téléphonique de plus de 2 heures au cours de laquelle ils ont discuté d’un éventuel cessez-le-feu en Ukraine. L’une des avancées a été un accord sur l’arrêt de part et d’autre des frappes sur les infrastructures énergétiques russes et ukrainiennes, immédiatement appliqué par Moscou, à la différence de Kiev. Le dirigeant russe a également défini les conditions d’un cessez-le-feu, parmi lesquelles « la nécessité de mettre fin à la mobilisation forcée en Ukraine ainsi qu’aux livraisons d’armement à l’armée ukrainienne ».
Alerte à Berlin
Du côté des Teutons, la tension reste vive. Dans l’émission télévisée de Sandra Maischberger, des experts militaires allemands ont laissé entendre qu’une « guerre totale » avec la Russie pourrait commencer dès 2029, rapporte Bild. Par ailleurs, la fin du conflit en Ukraine, selon les experts, « ne conduira pas à la paix ».
D’après Carsten Breuer, inspecteur général des forces armées allemandes, le fait que la taille de l’armée russe ait doublé en est la preuve. En outre, il a fait état de « structures militaires clairement orientées vers l’Ouest » près de la ville russe de Saint-Pétersbourg.
Carlo Masala, autre expert militaire allemand, a partagé son propre scénario d’une guerre avec la Russie, qui mêlerait opérations terrestres et guerre hybride. Il a appelé à prendre des mesures urgentes en matière de défense, y compris l’augmentation de la conscription militaire. L’expert allemand a souligné que la défense de la démocratie devrait être la première priorité des pays occidentaux. Se référant à son propre ouvrage, il a précisé que l’armée russe pourrait commencer des opérations militaires dans la ville estonienne de Narva sous prétexte de défendre la population russophone. « Pour une ville de 50 000 habitants, sommes-nous prêts à prendre le risque d’un conflit à grande échelle avec la Russie comportant inévitablement une dimension nucléaire ? », s’est-il interrogé.
Le président russe a déclaré à plusieurs reprises que la Russie n’a aucune raison de faire la guerre aux pays de l’OTAN, ni aucune revendication territoriale en Europe. Il a aussi souligné son intérêt pour le développement des relations avec l’Alliance. Concernant le conflit en Ukraine, V. Poutine a insisté lors de sa conversation téléphonique avec D. Trump le 18 mars sur l’importance d’un règlement global et à long terme, qui devrait être complet, durable et pérenne. D. Peskov, porte-parole du président russe, a indiqué aux journalistes que, contrairement aux dirigeants russes et américains, qui « cherchent des solutions pour déboucher sur un processus de règlement pacifique », l’Europe « s’est transformée en parti de la guerre ».