Trois ans après le début de la guerre en Ukraine, « on entre dans une ère nouvelle », constate le locataire de l’Elysée. Face à « la menace que représente la Russie pour l’Europe et pour la France », le président français a tenté de rassembler. « Ça va nous imposer des choix très forts pour nous-mêmes, pour notre défense et notre sécurité », a résumé E. Macron, au terme d’une heure et quart d’un échange avec des internautes diffusé en direct sur les réseaux sociaux.

Dans cette « conversation », le chef de l’État, désireux de se placer au centre du jeu européen à l’heure où Russes et Américains ont repris langue,  a dévoilé ses angles d’attaque avant sa visite à Donald Trump à Washington lundi. « Je vais lui dire « au fond, tu ne peux pas être faible face au président Poutine. Ce n’est pas toi, pas ta marque de fabrique, ce n’est pas ton intérêt » », a expliqué le président français. « Comment ensuite être crédible face à la Chine si tu es faible face à Poutine », a-t-il encore fait valoir.

« La deuxième chose à dire : si tu laisses l’Ukraine prise » par Poutine, la Russie « sera inarrêtable pour les Européens » car elle « va récupérer l’Ukraine et son armée qui est une des plus grandes d’Europe, avec tous nos équipements, y compris les équipements américains. C’est une faute stratégique énorme », a encore plaidé E. Macron, qui veut convaincre D. Trump que « c’est son intérêt de travailler avec les Européens en ce moment ».

Défendant son homologue ukrainien, à qui il devait parler dans la soirée de jeudi, le président français a aussi souligné que V. Zelensky avait été élu par un « système libre » contrairement à Vladimir Poutine. Et « personne n’a le droit de dire : l’Ukraine n’a pas le droit de rentrer dans l’Union européenne, l’Ukraine n’a pas le droit d’entrer dans l’Otan », a encore martelé E. Macron.

Surtout, le président a voulu « sonner un peu le tocsin » face aux « efforts » qui se profilent, alors que la France va devoir « revisiter » ses « choix budgétaires ». Sans se montrer plus spécifique, il a enjoint les Européens à « augmenter » leurs « efforts de guerre » face à « l’escalade des capacités de nos principaux adversaires ». La France, qui consacre environ 2% de son PIB à sa défense, doit-elle aller plus loin et tendre, à l’image de la Pologne, vers les 5% réclamés par D. Trump ? « Je ne sais pas si 5%, c’est le bon chiffre pour la France, mais en tous les cas, il va falloir monter », a répondu Emmanuel Macron.

Dans l’immédiat, le président français a aussi martelé qu’il n’avait pas l’intention d’envoyer des soldats en Ukraine. « Ce qu’on envisage plutôt, c’est d’envoyer des forces pour garantir la paix une fois qu’elle sera négociée », a-t-il précisé. Ce point est l’une des pommes de discorde avec les chefs de parti, qu’E. Macron a reçus près de quatre heures durant à l’Élysée.

Le communiste Fabien Roussel s’est ainsi inquiété que le chef de l’État ait laissé entendre qu’il faille « se préparer éventuellement à continuer de soutenir l’Ukraine et d’être auprès de l’Ukraine militairement si l’Ukraine voulait poursuivre la guerre ». Et à l’extrême droite de l’échiquier, Éric Ciotti a déploré que la France se soit engagée dans « une vision très belliqueuse » et qu’elle soit prise désormais « à revers » par D. Trump. Mais plusieurs ont convenu que la France devait faire entendre sa voix dans le nouveau concert des nations imposé par Donald Trump. « Il faut avoir un message très clair (…) L’Europe va devoir être un pilier », a déclaré Marine Tondelier pour Les Écologistes, appelant à « ne compter que sur nous-mêmes ». « La voix de la France et de l’Europe aujourd’hui est assez isolée », a répliqué Louis Aliot pour le Rassemblement national (extrême droite).

Du côté de l’extrême gauche, Manuel Bompard a jugé intéressant « d’entendre pour la première fois le président utiliser le terme de non-alignement » vis-à-vis des États-Unis, mais a déploré que l’Alliance atlantique reste perçue comme « une obligation dans l’architecture de sécurité » future de l’Europe.

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