« Notre programme nucléaire est pacifique. Nous nous opposons aux armes de destruction massive en raison de nos fondements religieux et de notre doctrine défensive », a déclaré Abbas Araghchi, chef de la diplomatie iranienne, depuis la capitale italienne, après une rencontre avec son homologue italien. Accusant Israël de « diaboliser l’Iran et de semer l’insécurité » dans la région pendant qu’il commet un génocide à Gaza, il a affirmé que c’est l’entité sioniste qui est « le principal obstacle à une Asie de l’ouest exempte d’armes nucléaires ».

Les pourparlers de samedi, également indirects ont eu lieu dans l’ambassade d’Oman. Vendredi, le responsable iranien a fait part de ses « sérieux doutes » quant aux intentions des Etats-Unis. Lors de sa rencontre avec son homologue russe, il a déclaré qu’il est « probable » de parvenir à un accord avec les États-Unis si Washington s’abstient de « formuler des demandes déraisonnables et irréalistes ». A. Araghchi a souligné que le droit de l’Iran à enrichir de l’uranium n’était « pas négociable », après que Steve Witkoff, envoyé américain pour le Moyen-Orient, a appelé à un arrêt complet de l’enrichissement.

« Nous sommes conscients que le chemin » vers un accord « n’est pas sans embûches », a écrit samedi sur X Esmaïl Baghaï, porte-parole de la diplomatie iranienne.

Téhéran cherche à obtenir des garanties de la part des États-Unis qu’ils ne se retireraient d’aucun nouvel accord nucléaire, dans un contexte de craintes d’une répétition du retrait de Washington de l’accord précédent en 2018, avait assuré vendredi un haut responsable iranien, dans des déclarations à Reuters.  Selon lui, l’Iran refuse de démanteler ses centrifugeuses ou de réduire l’enrichissement d’uranium à zéro, considérant ces questions comme des « lignes rouges » qui ne peuvent être négociées. Il a également rappelé que le programme de missiles de l’Iran était « non négociable », notant que Téhéran le considérait comme « faisant partie de ses capacités défensives légitimes ».

« L’équipe de négociation cherche à parvenir à un accord global basé sur plusieurs principes : le sérieux dans la fourniture de garanties, la levée des sanctions, le rejet du modèle libyen-émirati, éviter les menaces, l’accélération des négociations, la maîtrise des fauteurs de troubles (comme l’entité ennemie israélienne) et la facilitation des investissements », a expliqué, à son tour, Ali Shamkhani, conseiller du guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei. Et de souligner que « l’Iran est venu pour parvenir à un accord équilibré, et non pour capituler ».

Selon le site américain Axios, S. Witkoff a assuré vendredi pour des responsables israéliens, dont Ron Dermer, ministre des Affaires stratégiques qu’il a rencontrés à Paris, que Washington s’efforce de régler la crise nucléaire iranienne par la diplomatie. Jeudi, le président américain qui avait appelé en mars le pouvoir iranien à négocier un nouvel accord, tout en menaçant de bombarder l’Iran en cas d’échec de la diplomatie a affirmé qu’il n’était « pas pressé » d’utiliser l’option militaire. « Je pense que l’Iran veut discuter », a-t-il souligné.

En dépit des réticences de Washington, Israël envisage toujours de mener une frappe contre l’Iran dans les mois prochains, rapportent les médias. Selon l’agence Reuters, les responsables israéliens pensent pouvoir mener « une frappe limitée qui exige un soutien américain moindre ». Cette frappe serait plus petite que celle que Benyamin Netanyahu avait proposée au début.

Le Yediot Ahronoth a cité des responsables de la sécurité affirmant que Tel-Aviv estimait que la fenêtre d’opportunité pour stopper le programme nucléaire iranien se réduisait rapidement. Les estimations indiquent que l’establishment militaire possède désormais la capacité opérationnelle de mener une telle frappe, malgré les avertissements selon lesquels un succès complet nécessite une coordination américaine. Selon le journal, les milieux politiques et sécuritaires israéliens estiment que la frappe sur les installations nucléaires iraniennes ne vise pas seulement à stopper le projet nucléaire, mais pourrait également conduire à l’effondrement du régime de Téhéran. Un responsable iranien a confié à l’agence Reuters avoir des informations de sources crédibles qu’Israël envisage une attaque de grande envergure contre les sites nucléaires iraniens. « Ceci illustre qu’ils ne sont pas satisfaits des efforts diplomatiques en cours sur le programme nucléaire et que Netanyahu a besoin de guerre pour se maintenir au pouvoir », selon ce responsable.

Vol ukrainien

A signaler aussi que la Cour internationale de justice, basée à La Haye, a indiqué dans un communiqué publié le 17 avril, que l’Iran avait déposé une plainte contre le Canada, la Suède, l’Ukraine et le Royaume-Uni, en vertu de l’article 84 de la convention de 1944 relative à l’aviation civile internationale, concernant le règlement des différends. La CIJ précise que cette plainte vise à contester la décision rendue le 17 mars 2025 par le Conseil de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), à la suite d’une plainte déposée par les pays cités contre l’Iran.

Le 8 janvier 2020, peu après son décollage de l’aéroport international Imam Khomeini à Téhéran, deux missiles sol-air tirés par les forces armées iraniennes abattent un Boeing 737-800 de la compagnie Ukraine International Airlines, qui assure le vol PS752 entre Téhéran et Kiev. Les 176 personnes à bord sont tuées. En janvier 2024, le Canada, l’Ukraine, la Suède et le Royaume-Uni – dont des ressortissants figurent parmi les victimes – initient conjointement une procédure de règlement des différends devant le Conseil de l’OACI, accusant l’Iran d’avoir violé ses obligations internationales en faisant usage de la force contre un avion civil en vol. Le 17 mars dernier, le Conseil de l’OACI rejette les exceptions préliminaires d’incompétence soulevées par l’Iran. Par cette nouvelle plainte, l’Iran demande à la CIJ de se saisir du dossier et de déclarer le Conseil de l’OACI incompétent en la matière.

En juillet 2023, le Canada, l’Ukraine, la Suède et le Royaume-Uni avaient déjà saisi la Cour contre l’Iran, l’accusant de ne pas avoir pris toutes les mesures possibles pour empêcher le drame ni mené une enquête criminelle impartiale et transparente. Ces actions devant la justice internationale interviennent après l’échec des négociations directes avec Téhéran sur l’indemnisation des familles des victimes. En 2020, l’Iran avait proposé une compensation de 150 000 dollars par victime –offre rejetée par les autorités canadiennes et ukrainiennes, qui estimaient qu’une telle décision ne pouvait être prise unilatéralement.

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