« Des dizaines et des dizaines de morts noyés, dont des enfants, beaucoup de disparus. La Calabre est en deuil pour cette terrible tragédie. Mais où est l’Europe ? », a déploré dans un communiqué Roberto Occhiuto, président de la région.
L’embarcation d’une vingtaine de mètres qui transportait environ « 250 migrants » d’après certains témoignages, provenait de Turquie. Selon les secouristes à l’œuvre depuis dimanche matin, le bateau surchargé de migrants d’origine afghane, iranienne et pakistanaise s’est écrasé, en raison de fortes bourrasques, contre des rochers près de la plage de Steccato di Cutro.
Le bateau avait quitté le port de Smyrne il y a quatre jours. Un avion de Frontex l’avait repéré non loin de Crotone dans la soirée de samedi et lancé l’alarme pour des secours maritimes en provenance de Tarente et Crotone. Mais les conditions météo très adverses ont empêché de rejoindre la zone repérée. La vedette et le patrouilleur ont dû rebrousser chemin. Dimanche matin, les secours terrestres n’ont pu que constater que l’embarcation était détruite.
Giorgia Meloni, Première ministre, a exprimé dans un communiqué sa « profonde douleur pour les victimes des trafiquants d’êtres humains et réitéré l’engagement de son gouvernement pour bloquer l’immigration illégale ». Matteo Piantedosi, ministre de l’Intérieur, a parlé de « tragédie immense qui démontre qu’il est nécessaire de lutter contre les filières de l’immigration clandestine ».
De son côté, l’ONG Sea Watch a tweeté « l’absence de mission européenne de recherche est un crime qui se répète chaque jour ». Quant au pape François, il a déclaré à la fin de l’Angelus dominical : « Je prie pour chaque victime du naufrage et tous les migrants. Que la Vierge soutienne nos frères et sœurs ».
Les témoignages recueillis par la presse italienne, notamment ceux des secouristes, sont poignants. L’un déclare que seuls ceux qui ont réussi à sauter du bateau ont pu avoir la vie sauve, ceux qui étaient amassés dans la cale du bateau seraient tous morts. Des photos montrent des corps recouverts d’une housse mortuaire en plastique blanc avec un numéro inscrit sur chaque housse.
Ce nouveau naufrage survient quelques jours à peine après l’adoption par le Parlement de nouvelles règles controversées du gouvernement dominé par l’extrême droite sur le sauvetage des migrants. La nouvelle loi oblige les navires humanitaires à effectuer un seul sauvetage à la fois, ce qui, selon les critiques, augmente le risque de décès en Méditerranée centrale dont la traversée est considérée comme la plus périlleuse au monde pour les migrants.
La situation géographique de l’Italie en fait une destination de choix pour les demandeurs d’asile qui passent de l’Afrique du Nord à l’Europe et Rome se plaint depuis longtemps du nombre d’arrivées sur son territoire. Selon le ministère de l’Intérieur, près de 14 000 migrants ont débarqué en Italie depuis le début de l’année, contre environ 5 200 durant la même période l’an dernier et 4 200 en 2021.
Les ONG ne transportent pourtant qu’un faible pourcentage des migrants souhaitant arriver en Europe, la plupart étant sauvés par des navires de la garde côtière ou de la marine. Le gouvernement accuse cependant les ONG de stimuler par leur action les arrivées de migrants et d’encourager les trafiquants.
Ce naufrage dans la province de Crotone en Calabre pourrait être le plus dramatique après celui d’un bateau qui a sombré le 19 avril 2015, à 193 km de Lampedusa en Sicile, faisant 800 victimes.