Selon les évaluations faites par l’Institut américain pour l’étude de la guerre (ISW), l’armée russe a pris 478 kilomètres carrés de territoire ukrainien en octobre, un record depuis les premières semaines du conflit en mars 2022, rapporte l’AFP. Appelé à se prononcer sur le dossier ukrainien, lors d’un entretien accordée à Tucker Carlson diffusé dans la nuit du 31 octobre au 1er novembre, D. Trump auquel on reproche des accointances avec Vladimir Poutine, a déclaré avoir « mis fin » au projet de gazoduc Nord Stream 2 lors de son mandat. Il invalide, de la sorte, les accusations de sympathie pro-russe dont il fait l’objet. « J’y ai mis fin. Personne d’autre ne l’a fait, mais moi je l’ai fait. Je l’ai arrêté », a-t-il insisté. Cette déclaration du candidat républicain à la Maison Blanche a rapidement été commentée par le porte-parole du Kremlin, qui s’est montré sceptique quant aux propos du milliardaire. Selon D. Peskov, la déclaration semble dictée par « la fièvre électorale » aux États-Unis. « Il est difficile de supposer ce que M. Trump voulait dire », a-t-il ajouté, précisant que la construction de Nord Stream 2 avait été achevée et qu’un tronçon du gazoduc était prêt à être mis en service. Les propos de D. Trump font référence aux sanctions qu’il avait imposées en 2019 contre les entreprises impliquées dans la construction de Nord Stream 2, entraînant une interruption temporaire des travaux. Néanmoins, le projet a finalement été achevé en septembre 2021 grâce à des ressources russes. Cependant, en raison de l’opération militaire russe en Ukraine, qui a commencé en février 2022, l’Allemagne a gelé le projet avant même son lancement commercial. Les relations entre l’Europe, la Russie et les États-Unis se sont alors dégradées, et le 26 septembre 2022, plusieurs explosions ont gravement endommagé les deux pipelines de Nord Stream en mer Baltique.
D. Peskov a jugé que les propos de D. Trump étaient « extravagants et émotionnels », rappelant qu’ils se situent dans un contexte électoral intense, où les candidats n’hésitent pas à faire des déclarations choc pour capter l’attention de l’électorat. « La course électorale actuelle pousse les candidats à s’accuser mutuellement, ce qui ne correspond pas à notre culture politique », a-t-il ajouté en insistant sur le fait que les accusations de sabotage et de blocage définitif de Nord Stream 2 sont infondées. En 2022, les explosions des gazoducs Nord Stream, qui relient la Russie à l’Allemagne via la mer Baltique, ont été une grande source de tensions géopolitiques, et ont été qualifiées par Moscou d’acte de « terrorisme international ». Selon une enquête du journaliste Seymour Hersh, les États-Unis auraient planifié ce sabotage lors des exercices de l’OTAN Baltops 2022, et l’exécution aurait été réalisée avec l’aide de plongeurs norvégiens. Joe Biden, président sortant, aurait pris cette décision par crainte que l’Allemagne ne s’engage fermement à soutenir l’Ukraine. Cependant, Washington nie toute implication dans ces explosions, et des médias américains et allemands ont également avancé une « piste ukrainienne ». Une version loin de convaincre la diplomatie russe.
Disparition de l’Ukraine
Sergueï Lavrov, ministre russe des Affaires étrangères, a assuré samedi, lors de l’ouverture de la XVIe Assemblée du monde russe, que plus Kiev perturbait les accords, moins il restait à l’Ukraine de territoire. « Plus les dirigeants ukrainiens actuels, avec le soutien de l’Occident, détruisent les accords les uns après les autres, moins il reste de territoires à ce régime », a déclaré le chef de la diplomatie russe. Celui-ci a également rappelé que si tous les accords avaient été respectés en février 2014, « il ne se serait rien passé et la Crimée aurait fait partie de l’Ukraine ». Une position qu’avait déjà tenue le ministre en juin, à l’issue de la réunion du Conseil ministériel des États membres de l’OTSC. Le chef de la diplomatie russe avait alors rappelé l’accord de transition, signé le 21 février 2014, entre l’opposition et le président Viktor Ianoukovitch ainsi que les ministres allemand, français et polonais des Affaires étrangères. Un accord auquel la Russie ne s’était pas opposé, avait souligné S. Lavrov, mais qui fut « piétiné » dès le lendemain par le coup d’État de Maïdan et l’abrogation du statut du russe comme langue régionale, mettant le feu aux poudres dans le Donbass russophone. « L’Ukraine n’a pas voulu préserver son intégrité territoriale au prix du respect des droits élémentaires des habitants de Donetsk et Lougansk, notamment le droit de parler leur langue maternelle – en l’occurrence le russe – parce que cela n’allait pas dans la logique russophobe et néonazie des autorités de Kiev », avait alors déclaré S. Lavrov.
Le responsable russe a également rappelé les accords d’Istanbul. « Ils ont eu une troisième chance à Istanbul en avril 2022, le président [Poutine] en a parlé en détail. Bien sûr, les réalités actuelles sont également différentes de celles d’avril 2022 », a souligné le ministre. La Russie a déclaré à plusieurs reprises qu’elle ne renonçait pas à des pourparlers pour résoudre le conflit en Ukraine. Dans une interview publiée le 1er novembre dans le journal turc Hürriyet, S.Lavrov a une nouvelle fois estimé que la paix ne faisait « pas partie des plans » de Kiev et de ses soutiens occidentaux. « La Russie est ouverte à un règlement politique. Il ne devrait pas s’agir d’un cessez-le-feu temporaire, mais de mettre fin au conflit en supprimant ses causes profondes. Il s’agit notamment de l’expansion de l’OTAN vers l’est, qui menace les intérêts vitaux de la Russie en matière de sécurité, ainsi que de la violation par le régime de Kiev des droits des Russes et des résidents russophones de l’Ukraine », a noté le diplomate.
La veille de la publication de cette interview, Vassili Nebenzia, représentant permanent de la Russie auprès de l’ONU, avait averti au Conseil de sécurité que la Russie ne permettrait pas « de répétition du scénario des accords de Minsk », via un gel du conflit qui permettrait à Kiev de « panser ses plaies ». « Nous sommes prêts à chercher des compromis, nous sommes prêts à rendre ces compromis raisonnables » pour mettre un terme au conflit en Ukraine, avait déclaré le 24 octobre le président russe lors d’une interview accordée à la chaîne de télévision Rossia 1. Le 14 juin, lors d’un discours au ministère des Affaires étrangères, V. Poutine avait présenté les conditions préalables à la paix avec Kiev, afin de mettre « un terme définitif » au conflit : le « retrait complet » des troupes de Kiev des Républiques populaires de Donetsk (RPD) et de Lougansk (RPL), ainsi que des régions de Zaporojié et de Kherson. Une proposition rejetée par Kiev et ses principaux soutiens occidentaux.
Pyongyang appui Moscou
Lors de la réunion du Conseil de sécurité du 30 octobre, le représentant permanent de la République populaire démocratique de Corée auprès des Nations unies a déclaré que Pyongyang réagirait si la Russie était menacée.
« Nous serons seuls juges de la réponse à donner » si les actions des États-Unis et des pays occidentaux venaient à menacer la souveraineté et la sécurité de la Fédération de Russie, a déclaré Kim Song, représentant permanent de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) auprès des Nations unies,. « La RPDC et la Fédération de Russie ont le droit de développer des relations bilatérales communes dans tous les domaines », a-t-il souligné. « Si la souveraineté et les intérêts de sécurité de la Russie sont touchés et menacés par les actions dangereuses des États-Unis et de l’Occident, nous serons seuls juges de la réponse à donner », a poursuivi le diplomate nord-coréen.
Kiev, Washington et l’OTAN multiplient les déclarations selon lesquelles des milliers de soldats de la RPDC, qui seraient présents en Russie, s’apprêteraient à prendre part aux combats. Des allégations, concernant la présence de soldats nord-coréens au front, qualifiées de « mensonges éhontés » par V. Nebenzia.
Le 1er novembre, lors d’une visite officielle à Moscou, Choi Seong-hee, ministre des Affaires étrangères de la RPDC, a déclaré que Pyongyang se tiendrait aux côtés de la Russie « jusqu’au jour de la victoire » en Ukraine. « Dès le début de l’opération militaire spéciale, l’honorable camarade président des affaires d’État [de la RPDC] Kim Jong-un a ordonné que nous soutenions et aidions invariablement et puissamment l’armée et le peuple russes dans leur guerre sainte, sans regarder en arrière », a déclaré la ministre, citée par l’agence TASS. Le même jour, S. Lavrov a confirmé que les services militaires et spéciaux de la Russie et de la RPDC étaient en contact pour résoudre les problèmes de sécurité. « Des contacts étroits ont été établis entre les armées des deux pays et les services de sécurité. Cela permet de résoudre des tâches pratiquement significatives et importantes pour la sécurité des citoyens de nos pays », a-t-il déclaré. Le 24 octobre, la Douma, chambre basse du Parlement russe, a ratifié un accord de partenariat stratégique avec la RPDC destiné à renforcer la coopération dans plusieurs domaines, y compris la sécurité nationale. Ce traité, signé le 19 juin entre Vladimir Poutine et Kim Jong-un à Pyongyang, prévoit notamment une assistance en cas d’attaque par des pays tiers.